« T'aurais du crever, je ne sais même pas ce que tu fais ici. » lança mon père, un regard noir, un regard furieux dans ma direction. Je n'étais qu'une enfant, une enfant de deux ans qui ne comprenait pas bien pourquoi son père la détestait tant. Je ne savais pas pourquoi ma mère n'était pas là pour me protéger, pourquoi je me sentais si seule et surtout, pourquoi mon père passait ses journées à boire et à me frapper. Qu'avais-je faire pour mériter ça? Je ne l'ai jamais su et avant que mon père ne finisse par me tuer je fus retirée de ses mains et placée dans un orphelinat. Je n'avais pas voulu partir, même s'il me battait, chaque soir, chaque jour, je n'étais pas prête à le quitter. C'était la seule famille qui me restait et on me l'avait pris encore une fois. Je n'ai jamais eu de ses nouvelles, il n'est jamais venu me voir. Il n'a jamais tenu son rôle de père. Et pourtant, je ne pouvais m'empêcher de l'aimer, d'avoir envie de le voir, de vouloir savoir ce qu'il était devenu. Pourquoi il ne m'avait pas répondu à mes nombreuses lettres. Car oui, je suis resté dans cet orphelinat pendant sept ans. Sept ans où chaque nuit je refaisais ce cauchemar. Ma mère, ensanglantée et mes mains remplies de sang. Mon sang? Non celui de ma mère, couchée sur son corps, je me fais trainer par l'homme qui l'a tué. Et quand je me retourne pour savoir de qui il s'agit, qui est le meurtrier de ma mère, je me réveille. J'ai été consulté, de nombreuses fois, avec des psychologues différents et ça n'a jamais rien donné. Selon eux, mon organisme refoule ce souvenir qui m'a sans doute traumatisé. Au fond, ils restent persuadés que c'est mon père qui a tué ma mère - un soir où il était trop ivre - mais pour moi, ce n'est pas possible. Il ne peut pas l'avoir tué, pas lui.

J'ai passé sept longues années à me demander si on allait enfin venir me chercher. Et ce jour arriva. Un jour où le soleil brillait, les oiseaux chantaient et où j'étais enfin heureuse. Du moins je le croyais. La famille qui m'a accueillie était la famille Hawkins. Une famille bien selon l'orphelinat. Une famille qui avait déjà adopté auparavant et avec qui on n'avait pas de problèmes. Sauf que les assistants sociaux n'étaient pas au courant de tout. La première fois où Il s'est glissé dans mon lit arriva deux semaines après mon installation chez eux. Je ne peux pas prononcer son prénom ni même son nom. Pour moi ce monstre est un "Il" et le restera. Il n'a pas perdu de temps et s'est glissé dans mon lit presque chaque nuit. Jusqu'à ce que je sois assez forte pour me défendre. Au départ je n'ai pas compris ce qui m'arrivait, je me disais que c'était simplement une marque d'affections et puis j'ai compris que ça n'arrivait qu'à moi.

À l'âge de douze ans, j'ai enfin réussi à me défendre. J'ai enfin pris mon courage à deux mains. Je me défendais, le frappait, le mordait comme je pouvais. Lui ça le faisait rire et même si parfois j'arrivais vraiment à lui faire mal, il continuait. Beaucoup moins souvent mais il continuait quand même. Je me suis jurée qu'à mes dix huit ans je me barrerais d'ici et l'empêcherait de recommencer. La justice ne serait pas de mon côté. Oh non, pas du côté d'une fille à problèmes traumatisée par son enfance. Alors si je devais me venger seule, je le ferais.

« C'est quoi ton problème Fawkes? T'as envie de te retrouver la tête dans les toilettes? » la provocation était mon jeu favori. Depuis toujours. Surtout depuis que j'avais quitté la maison des Hawkins et pris ma vie en main. À ma majorité, du moins ma majorité avancée parce que oui j'avais demandé un droit d'émancipation. J'étais donc fin prête pour prendre ma revanche sur la vie mais surtout sur les hommes. J'avais décidé de ne plus me laisser faire, d'oublier. Oublier mon passé et me construire un avenir. Jouer avec les hommes comme ils l'ont fait avec moi. uc