Une belle après midi ensoleillée avait débuté. Théo avait déjeuné en terrasse ce midi et au vue du beau temps, il n’avait qu’un seule envie : aller se faire une agréable balade dans les collines de lonelies hill sur le dos de sa jument préférée. En plus, il était en repos et n’avait rien de prévu. Une fois la note de son repas réglée, il fila donc en direction du centre équestre. Il salua quelques cavaliers qui discutaient dans le club house, il attrapa une boîte de pansage et se dirigea directement vers le box de Tempête.
Tempête est une magnifique jument, à la robe blanche tachetée de gris. Son nom n’aurait pas pu mieux lui convenir. Elle avait un caractère prononcé, et ne se laissait pas facilement approcher. Le jeune homme l’appela et la jument passa docilement sa tête par dessus la porte du box. Il lui caressa tendrement l’encolure et elle se laissa faire en hennissant joyeusement, devinant la balade qui s’annonçait avec le jeune homme. Théo avait rencontré quelques difficultés au début avec elle, avec son sale caractère, la jument lui en avait fait voir de toutes les couleurs, puis finalement, avec le temps, il avait su gagner le respect de l’animal avec qui il était particulièrement complice à présent. Elle avait même fait de lui son cavalier préféré. Il allait pénétrer à ses côtés et commencer à la préparer pour leur balade, lorsqu’il entendit une voix familière dans le box adjacent qu’il reconnut immédiatement : Noë.
C’était une excellente cavalière, à la patiente et aux conseils précieux qui lui avait enseigné les bases et l’avait soutenu pour progresser plus rapidement. Sa coach particulière en quelque sorte. Il suivit le son de sa voix et la salua avec un grand sourire « Salut toi ! » Elle était en train de seller sa monture. Il s’avança vers elle pour l’embrasser sur chaque joue puis il lui demanda ce qu’elle avait prévu : « Tu as un cours de prévu ? Ou bien tu pars en balade ? Parce que j’allais justement partir me promener avec Tempête… Et j’avoue que j’aurais bien besoin des conseils de mon professeur préféré… » Il adorait les balades avec Noë, pas seulement pour les conseils précieux qu’elle lui prodiguait mais également pour son sourire, son entrain, sa conversation fraiche et divertissante. Il lui avait dit qu’il était amnésique, mais bien qu’elle le sache, elle le traitait comme n’importe qui d’autre, sans pitié ou compassion exagérée à chaque regard. Avec elle, il ne se sentait pas traité comme un handicapé, il se sentait normal et il aimait ça.

La monture de son amie Hurricane était un jeune cheval de 5 ans, encore fougueux et dont le caractère était déjà bien marquée. Ses humeurs rivalisaient très bien avec celles de la jument préférée de Théo. Le cavalier n’avait jamais eu l’occasion de monter Hurricane, de toute façon Noë était la seule cavalière qui y parvenait. Il passa sa main sur l’encolure du cheval et le caressa affectueusement. Noë releva la tête vers lui et son sourire réjouit immédiatement le jeune homme. Elle le salua et adhéra tout de suite à son invitation d’aller se balader tous les quatre, elle sur le dos d’Hurricane et lui sur le dos de Tempête. Le quatuor de choc réunit.
« Termine tranquillement, je n’ai pas encore commencé à préparer Tempête. On se retrouve dans la cour dans 10 minutes ? »Le cavalier retourna auprès de sa jument qui hennissait d’impatience en grattant la paille de son box de son sabot. La vue de Théo était synonyme pour elle d’une balade au grand air. Théo montait rarement en manège, préférant l’espace et la grandeur des collines verdoyantes de lonelies hill à la monotonie des tours de carrière. « Doucement ma belle, j’arrive. » fit-il d’une voix douce en lui caressant affectueusement l’encolure. Il lui passa le licol et commença à panser la robe de sa jument pour retirer la poussière qui s’y était déposée. Après une toilette attentionnée, il lui cura ses quatre sabots délicatement. Il put ensuite déposer la selle sur son dos et lui enfiler les harnais du filet. Il attrapa les rênes et l’entraina dans la cour où Noë l’attendait déjà perchée sur la selle de son fougueux cheval. « Excuse moi j’ai pris un peu de temps, elle avait vraiment besoin d’un bon pansage… » fit-il tout en passant son pied dans l’étrier. Il se hissa avec adresse et souplesse sur le dos de tempête, régla la hauteur des sangles pour que ses jambes tombent à la bonne hauteur puis il sourit à son amie : « T’es prête ? »
En fait Théo était aussi impatient que Tempête. Elle, elle rêvait de se dégourdir les jambes, de partir au grand galop dans les sentiers dégageait des vallonnements environnants, lui, il ne rêvait que de se vider la tête et d’apprécier le grand air de la verdure San Diegoise. La semaine avait riche en événement pour le jeune homme. Chevaucher dans les collines s’imposait, comme un besoin, bien plus qu’une simple envie. Le fait de passer du temps avec Noë était une aubaine, la cerise sur le gâteau en quelque sorte. Il savait qu’à ses côtés, il ne pouvait passer qu’un moment agréable et de détente…

Noëlya juchée sur Hurricane, ajusta ses étiers et resserra sa sangle avant de se déclarer prête avec un beau sourire craquant. La jeune femme avait élégamment attaché ses cheveux blonds en une queue de cheval. Théo était toujours soufflé par majesté et la prestance que dégageait la cavalière dès qu’elle était sur le dos de sa monture. Noë fit avancer Hurricane. Le cheval bai partit au pas et Théo resserra doucement ses talons contre les flancs de sa jument pour lui intimer l’ordre de suivre son copain bai.

Tempête s'exécuta, rattrapant rapidement le mâle et Théo se retrouva alors à la hauteur de la jeune femme. Les deux amis avaient l’habitude de profiter de leurs petites escapades pour bavarder tranquillement. Noë lui demanda de ses nouvelles tout en soulignant son plaisir d’entreprendre cette petite balade. « Moi aussi je suis ravi, ça fait un moment qu'on a pas fait ça. » Cela faisait effectivement longtemps que les deux jeunes gens n’avaient pas eu l’occasion de randonner ensemble. Théo répondit ensuite à sa question : « Oh tu sais la routine. La boutique, on a d’ailleurs fait un très gros chiffre d’affaire grâce à la fête des mères… Et puis à l’appart tout va bien… Ca s’arrange même un peu avec Nolan. » Théo avait déjà confié à Noë combien Nolan, le colocataire de sa meilleure amie, semblait être dérangé par sa simple présence. Une situation quelque peu venimeuse puisque depuis un an Kirby avait proposé à Théo de l’héberger dans l’appartement qu’elle partageait avec le brun. Parler de cette situation délicate avec la cavalière soulageait toujours Théo. Noë était une oreille attentive, une amie précieuse, qui savait écouter sans juger. « Et toi de ton côté ? Comment ça va ? »demanda-t-il à son tour.

Tempête tirait doucement, appuyant sur son mort. Théo resserra doucement son emprise sur les rênes pour la ralentir, amusé par l’empressement de sa jument. Les cavalières dirigèrent leurs montures sur un petit chemin qui sillonnait parmi les collines environnantes. Un petit vent s’était levé. Théo adorait la sensation de l’air contre son visage. Le cavalier ne portait pas de bombe non plus, une mauvaise habitude empruntée à son amie, qui pourtant lui avait vivement conseillé de porter une protection pour sa tête. Mais Théo était tétu, et il lui répondait à chaque fois que la foudre ne frappait jamais deux fois au même endroit. Et puis au pire, si il chutait et se blessait à la tête, peut être que ça ferait revenir sa mémoire, plaisantait-il parfois. La vérité, c’était qu’au côté de Noë et juché sur le dos de Tempête, Théo se sentait parfaitement en sécurité. Ca n'avait pas toujours été le cas. Il se rappelait encore de sa première fois à cheval, chevauchant Tempête, fougueuse et indomptable à l’époque car elle ne le connaissait pas encore. Il s’était cramponné au pommeau de sa selle durant toute la première demi-heure de la balade, crispé et pas vraiment détendu. Drôle d'impression au début : «C’est haut, ça balance...» avait-il pensé alors. Puis il s’était habitué au rythme de marche de Tempête, se laissant bercer, prenant peu à peu ses aises, ressentant même un véritable plaisir et un bien être incroyable. Ce fut ainsi que la passion de l'équitation naquit en lui.

Noë but ses paroles avec son attention habituelle, son petit commentaire sur les femmes et les fleurs le fit sourire. Il se fit la réflexion que la prochaine fois, il ramènerait un bouquet pour son amie. Après tout elle le mériterait plus que personne après tous les cours particuliers, la patience et la pédagogie dont elle avait fait preuve avec lui. Il ne serait probablement pas devenu le cavalier qu’il était sans son aide. Et il lui devait beaucoup, car l’équitation était plus qu’une passion à présent pour lui. C’était un peu sa bouée de sauvetage, quand tout tournait mal, quand il ne savait plus où il en était, que Kirby était au travail ou qu’il ne voulait pas la déranger avec ses idées noires, c’était au centre qu’il se rendait, auprès de Tempête. Sur le dos de sa jument, ses tracas et ses angoisses semblaient soudain s’effacer et le bien être l’envahissait toujours.
Noë se réjouit sincèrement lorsqu’il lui raconta comment les choses entre Nolan et lui semblaient s’être améliorées. Son interlocutrice la questionna ensuite sur Kirby. Et le sourire du cavalier s’agrandit rien qu’à l’évocation de ce prénom. Kirby, sa meilleure amie, celle que le destin avait mis sur sa route. Celle qui avait donné un sens à son nouveau départ à San Diego. Celle qui l’avait recueilli à bras ouvert, lui faisant une place dans son appartement et dans sa vie, lui offrant son amitié et son aide. Celle sans qui il n’aurait probablement pas pu remonter la pente. Son regard s’éclaira alors qu’il répondit à Noë : « Tout va bien avec Kirby. J’avoue que j’admire sa force. » Théo repensa au moment partagé avec son amie sur la tombe de son mari, il s’était senti douloureusement impuissant face à la détresse de Kirby, il aurait tellement aimé l’aider plus… «Ce n’est pas évident pour elle en ce moment, avec l’anniversaire du décès de son mari… J’aimerais tellement l’aider, après tout ce qu’elle a fait pour moi… Mais je crois qu’on ne peut pas faire grand chose dans ces cas là, pas vrai ?» Si Théo lui posait la question, c’est que le meilleur ami de Noë était veuf également. Elle aussi avait tenté de soutenir et aider son ami dans son deuil, ce sentiment d’impuissance et d’abattement qu’on pouvait ressentir devant la détresse d’un ami endeuillé, elle les connaissait également. Le pas de Tempête le bercer agréablement et une légère brise balayait son visage. Cette balade était vraiment une excellente idée : reposante et agréable et parler avec son amie était toujours un plaisir. Noë se confia à son tour, avouant avoir des sentiments pour deux personnes à la fois… Théo tourna la tête vers la cavalière, intrigué. Elle lui avait déjà parlé de son attirance pour Harper, son meilleur ami, coureur et volage depuis le décès de sa femme. Ce n’était pas une situation évidente pour Noë… Mais si à présent il y avait un autre homme dans le tableau, cela ne risquait pas de simplifier la situation. La jeune femme ne se départit pas de son sourire pour autant. « Je devine que tu parles d’Harper… Mais qui est l’autre garçon en question ? » demanda Théo. Oh bien sûr, ce n’est pas Théo qui serait de grand conseil à Noë. Il avait surement du tomber amoureux avant son accident, il avait peut être même eu une vie amoureuse tumultueuse autrefois, mais comme il n’en gardait aucun souvenir, il avait parfois l’impression d’être aussi naïf et aussi innocent qu’un jeune ado en terme de relations amoureuses. Ce manque de souvenirs, la peur de ne pas savoir comment s’y prendre, d’être maladroit, le paralysaient toujours lorsqu’il réussissait à décrocher un rendez vous avec une jolie fille. Il avait finit par se résoudre à son célibat, l’amour c’était probablement pas pour lui… Ce qui n’empêchait en rien le jeune homme de s’intéresser à la vie amoureuse de son amie, et puis se confier pourrait faire que du bien à Noë et peut être que mettre des mots sur ses sentiments l’aiderait à y voir plus clair.