FIRST OF THE YEARS
Quand Maria Anna Cartier mis les pieds dans l'avion qui devait l'emmener à l'autre bout du monde, elle se senti prise de vertige. La voilà sur le point de s'enfuir, dans sa tenue de voyage, deux énormes valises dans la soute a bagage, en compagnie de l'homme de sa vie ; son frère. Une vague d'émotions et de souvenirs vint lui fouetter le visage sans ménagement, une excitation sans pareille lui étreint le coeur et l'âme. Aussi ridicule que ça puisse paraitre, elle eut l'impression d'être en train de faire la plus grande bêtise de sa vie, celle qui finirait d'achever ses parents. Et elle adorait cette idée. Ses parents, elle ne les détestait pas, mais elle leur en voulait pour une bonne centaine de raisons, surtout à son père à vrai dire. Son père était un ministre, sa mère une chirurgienne de renom et la maison gigantesque, deux enfants blonds comme les blés, il ne manquait qu'une paire de labrador pour transformer la scène en tableau Idyllique. Le long fleuve de la vie avait suivi son cour calmement, surement pendant de longues années, le père voyageait, il emmenait souvent Teddy, plus rarement Maria et tandis que le père et le fils nouaient supposément une relation d'homme a futur homme, la blondinette restait avec sa mère. C'était une brave femme, intelligente, mais ayant toujours été victime de son manque de caractère. Sans trop s'en rendre compte elle s'était mariée à un politicien assez célèbre, peut-être avait-elle une certaine affection pour lui, mais Maria avait toujours été persuadée qu'elle n'aimait pas d'amour son père. Ça n'était pas grave, l'enfant ne le portait déjà pas dans son coeur a l'époque, elle le préférait loin que présent, malade et silencieux plutôt que suffisamment en forme pour se lancer dans des discours interminables, enfermé dans son bureau plutôt qu'assis façon chien de garde dans le salon, attrapant sans ménagement le premier des deux enfants qui pointerait le bout de son nez pour le sermonner, lui donner des leçons de vie, exprimer son autorité de mâle alpha. Mais quand Maria se contentait de baisser la tête et d'écouter le paternel en soupirant discrètement, Teddy sortait doucement du schéma de dominant-dominé pour prendre le rôle du jeune lion, plus grand, plus fort, la crinière qui s'étend, les griffes et les crocs s'allongent, le pouvoir glisse des mains du vieux lions bientôt sénile et glisse entre celles du fils, c'est surement pour ça, que les lions mangent leurs petits. Elle l'aimait. Pas parce qu'il semblait si fort, mais parce qu'il était son frère tout simplement, elle l'aimait depuis toujours passionnément et jalousement aussi, mais pas assez pour en venir à haïr viscéralement ses petites copines, juste ce qu'il faut pour garder a vie une amertume à leur encontre. Ils avaient toujours marché côte à côte, main dans la main, si Maria avait besoin d'aide, Teddy rappliquait illico et vice-versa. Peu importe la situation la raison, que l'autre ai parfaitement tord ou non, c'était une relation de sang une de celles qui nous font faire des folies. Il avait dix-sept ans et entamait ses études dans le domaine de la politique, Maria projetait silencieusement la même chose. Le paternel se révéla de voir que son fils s'apprêtait à marcher dans ses pas et Maria étonnamment satisfaite a l'idée de marcher dans ceux de son frère. Bientôt ils seraient majeurs, pourraient quitter la maison. Le destin était en marche, mais pas forcément dans le bon sens.
BOYS DON'T CRY
« A quoi tu penses, Maria ? »Elle voulut répondre qu'elle pensait au fait qu'il lui posait vraiment des questions à la con et que ce sont les filles qui font ce genre de choses normalement, mais elle se tut et l'embrassa gentiment, il lui sourit. Elle avait déjà eu deux copains avant lui. Rien de bien sérieux ces deux premières fois ; des garçons à la beauté olympienne, grand front, nez droit, blonds aux yeux clairs, des copies inconscientes de son grand frère probablement. Ils étaient plutôt cool, Henry et George, des prénoms de merdes, un peu cons sur les bords, mais beau et sympa, c'était amplement suffisant pour une gamine comme elle. Mais avec celui-là, ça n'était pas tout à fait pareil. Il était juif, s'appelait Théodore et avait des airs de Sean Penn, pas tant beau que charmant, bruns comme tout et des yeux oscillant entre le vert et le brun clair il n'avait qu'un an de plus qu'elle. Théodore était un brave type, il ne la forçait jamais à faire quoique ce soit, bien qu’il soit bien moins riche qu’elle, il lui payait le cinéma, le café, le R.E.R et l’entrée pour Disneyland. Elle était certaine d’être amoureuse de lui et que lui l’était aussi, qu’ils resteraient très longtemps ensemble et qu’avec un peu de chance ils pourraient se marier un jour, bref tout ce sur quoi qu’une gamine amoureuse commence à fantasmer. Elle avait déjà fait l’amour avec l’un des deux autres, George, au début ça ne s’était pas très bien passé, mais elle n’en gardait pas de traumatisme, d’autant plus que les fois suivantes avaient été plus que satisfaisantes, elle avait eu des orgasmes presque à chaque fois, George m’était un point honneur à ce que cela arrive, une histoire de fierté personnelle très certainement. Théodore commença à la tripoter comme il le faisait souvent, ses seins, ses fesses, ses cuisses, son ventre, il l’embrassait un peu partout et elle lui rendait ses marques d’affection avec autant de tendresse. L'esprit légèrement embrumé.
« Mon frère va se marier, je crois. » Il ne cessa pas de la caresser, mais il ne l'embrassa plus et ne toucha plus ni ses seins ni ses fesses, loin d'être bête le garçon avait depuis longtemps pris conscience de l'importance qu'avait son frère dans la vie de sa petite copine, sur un sujet si sensible il devait garder les idées bien claires au risque de la vexer voir de la blesser.
« Cette fille est une salope, elle ne l'aime pas et il ne l'aime pas non plus. Il sera malheureux comme les pierres, en colère et frustré et je n'ai pas du tout envie de ça. J'aimerais bien qu'elle meure. Honnêtement, Theodore, si je pouvais appuyer sur un bouton qui la fasse mourir dans la minute, je le ferais sans hésiter une seule seconde. » Il ne dit rien, mais pensa tout bas qu'elle ne le ferait certainement pas et que c'était bien son genre de parler et parler sans jamais rien faire, comme elle attendait une réponse il essaya de lui expliquer que c'était à son frère de gérer ce genre de choses et qu'il était hors de question qu'elle se rende malade à cause de son incapacité à envoyer paitre son père ce à quoi elle répondit par un silence pesant.
AAAHA REJECTION ♫
« Il nous manque, n'est-ce pas ? » Maria ne répondit pas. Elle avait les mains sales de tripe de poissons, elle arracha sans ménagement les entrailles de la pauvre bête qu’elle tenait entre ses mains et posa empressement sa carcasse à côté de deux autres. Elle eut le réflexe de lancer sa main en avant afin d’attraper un quatrième poisson, mais elle se referma dans le vide, comme si elle avait voulu attraper un ectoplasme. Il n’y avait pas de troisième poisson, voilà, parce qu’ils n’étaient plus que trois. Les cheveux noués en arrière, les mains rouges de sang de poisson, essayant d’attraper quelque chose qui n’était même pas présent ; la métaphore parfaite de sa vie actuelle. Ce connard a foutu le camp, il a mis les voile, il m’a abandonnée. Elle avait envie de hurler que cet abruti ne lui manquait pas, qu'elle détestait les lâches et que par conséquent elle le détestait lui, elle voulait l'insulter dans toutes les langues, mais tout ce qui parvint à jaillir de sa bouche fut une sorte de couinement de chien blessé. Sa mère voulut l'enlacer, mais elle avait les mains sales aussi, alors elle se contenta de se coller à elle et Maria la repoussa en gémissant. A elle aussi elle lui en voulait. D'être si fade, comme déjà morte, d'être si soumise. Elle qui avait toujours été si distante, mère de l'ombre, aujourd'hui tentait de l'amadouer, se faisait plus tendre comme si face à la dure réalité - son fils était parti comme un voleur, sans adieux, sans larme - elle tentait de se rattraper. Teddy son enfant, la chaire de sa chaire l'avait abandonné, c'était tout comme s'il était mort, elle se raccrochait donc sans ménagement à sa fille comme à une bouée, l'unique enfant de la maison dorénavant. Avec le temps Maria s'était faite plus vindicative à l'encontre de son père, aujourd'hui pas un repas ne se passait dans le calme, lui gardait une amertume à l'encontre de son fils qu'il ne savait pas dissimuler et se défoulait sans ménagement sur sa fille qui quand à elle ne parvenait plus garder son calme et partait dans de violentes colères pour un rien. Quand l'homme quittait la maison, la mère poussait un profond soupir et s'affalait dans le canapé avant de fondre en larme, elle espérait certainement que Maria viendrais la consoler, mais elle ne le fit jamais, elle aimait savoir qu'elle pleurait, car cela signifiait que quelque chose la faisait souffrir Maria espérait que ce fusse des regrets. La jeune femme se sépara d'avec Théodore qui ne supportait plus de la voir si amère et de ne l'entendre jamais parler que de son frère. La séparation l'avait rendue triste et le fait qu'il se remette très vite avec une jolie jeune fille rousse encore plus. Elle sentait bien qu'il la regardait encore, parfois il se croisait et il effleurait sa main, mais elle ne tenta jamais de le reconquérir, Théodore devint un simple morceau de sa vie, un souvenir égaré parmi des centaines d'autres. Mais sa frustration ne fût pas sans fin, bientôt elle apprit que son frère serait bientôt de retour en ville et le bonheur qui l'emporta fut le plus fort de toute sa vie. Elle serra sa mère dans ses bras, sortit faire la fête avec une bande de copine, heureuse comme tout, mais déterminée à punir son frère en le boudant le plus longtemps possible, l'heure du pardon n'en serait que plus forte. Elle ignorait à ce moment-là la carrure de l'ascenseur émotionnel qu'elle s'apprêtait à subir.
CALL ON ME
Sa femme était morte en donnant naissance à un bébé mort-né. Wouah. La jeune femme dut s'asseoir pour encaisser le choc, elle se mit à pleurer, toutes les émotions possibles et imaginables se mélangeaient en elle en même temps. La rancoeur, la colère, l'amour, la tristesse, un pardon immense et surtout, une compassion monstrueuse. Elle se sentait prise de vertige et s'accrocha à son frère, elle pleura tellement qu'elle ne se rendit même pas compte qu'il lui parlait, peut-être avait-il pleuré aussi, mais elle n'en eu pas conscience. Elle n'arrivait plus à lui en vouloir, elle se fit très tactile, câlins, baisers, comme si toutes ces tendresses allaient changer quoi que ce soit. Elle espérait qu'il lui dise quelque chose du genre ne t'inquiète pas, je vais rester avec toi, tout iras bien. C'était un espoir très naïf, car dorénavant sa vie ou du moins une grosse partie, c'était l'Amérique. Il lui avait d'ailleurs proposé de partir avec lui. Ah. Avait-elle dit. Je ne sais, je dois réfléchir, tu sais ce n'est pas si simple. Faux. C'était très simple, Du haut de ses vingt ans elle pouvait quitter le pays comme bon lui semblait, sans rendre de compte à qui que ce soit, l'anglais elle le parlait impeccablement bien, il lui suffirait de faire quelques démarches admiratives fastidieuses pour pouvoir quitter le territoire et suivre ses études à l'étranger. Mais abandonner sa vie ici pour lui en était-elle capable ? Parce que soyons réaliste ; sa vie ne serait pas meilleure ni plus simple là-bas qu'ici. Sa famille lui tapait violemment sur le système, mais sa famille était riche, les plus grandes écoles du monde lui ouvriraient affectueusement les bras si son père le leur demandaient. Elle en parla a quelques amies qui lui dirent de rester, puis à des potes qui lui dirent de rester puis à son copain très intime du moment avec qui elle avait couché une ou deux fois qui lui dit de partir. Elle l'embrassa lui dit qu'elle l'aimait et puis se décida à partir.
La vie ne changea pas autant qu’elle aurait pu l’espérer. Le cadre était diffèrent, mais les New Yorkais n’avaient rien d’exceptionnel en comparaison avec les Parisien, excepté leur langue. Maria se fit vite des amis, elle devint la petite française de son école de droit, on l’aimait pour sa beauté très Frenchie et son accent aux sonorités exotiques. Teddy l’a mis vite au parfum ; il était à la tête d’un gang de criminels New Yorkais que dirigeait autrefois leur père. Trinity sa petite copine actuelle n’était pas au courant, c’était une affaire familiale après tout. Maria tira une certaine fierté du fait qu’elle était dans la confidence alors que l’autre fille ne l’était pas. Il ne faut pas se méprendre ; elle ne la détestait pas, au contraire. Mais comme toutes les copines qu’avait pu avoir son frère chéri, elle ne la portait pas dans son cœur, la regardait parfois de travers et n’hésitait pas à lui lancer quelques remarques acerbes, en tout bien tout honneur bien sûr. La vie suivait son cour normal, lui se la jouait bandit façon parrain de New York, elle suivait ses études assidument espérant pouvoir ouvrir un jour son propre cabinet d’avocat, histoire de réaliser le rêve qu’elle partageait encore avec son frère il n’y a pas si longtemps.
Elle n'avait rien compris à leur histoire, mais apparemment non seulement ils ne toucheraient plus l'argent du gang, mais en plus il fallait lever les voiles. Maria soupçonnait une connerie de la part de sa copine à lui, mais elle se tût, fit ses valises, entrepris encore une fois une tonne de démarches admiratives pour changer d'établissement et les accompagna pour San Diego.