Poussez. Encore plus, courage. Elle poussa un cri de terreur avant de foutre un bon coup entre les cuisses du gynécologue en face d'elle. Ce dernier meurtri par la douleur s'effondra par terre. HORS DE MA VUE. Je me débrouillerai toute seule, merde. Elle n'avait que vingt ans mais était déjà très forte comme femme. Il ne faut pas non plus oublier qu'elle était médecin elle aussi. Le Docteur quitta la pièce plié de douleur. Ce soir là, elle refusa l'aide de quiconque. Elle détestait qu'on lui donne des ordres encore moins qu'on la traite comme une petite princesse fragile, une moins que rien. Qu'on la regarde comme l'irresponsable étudiante qui n'avait pas eu l'idée d'utiliser un préservatif. Bref, ce soir là elle se débrouilla toute seule. Elle coupa même le cordon, son propre cordon. Mme Hutchinson devint donc une légende à l'hôpital de New York. D'ailleurs, aujourd'hui même elle y travaille en tant que gynécologue et elle est même connue pour avoir inventé une nouvelle méthode beaucoup plus naturelle pour accoucher. Cette femme, c'est ma mère. Elle ne cesse de me répéter cette histoire tous les jours, toutes les heures, toutes les deux minutes. Elle voulait sans doute que son histoire me marque, que j'en ressorte avec une quelconque morale, une conclusion qui m'aidera dans ma vie mais le seul hic c'est que je n'ai toujours compris. Sincèrement, je ne vois vraiment pas en quoi cette histoire allait m'être utile dans l'avenir ?

P'tain Pi, calme-toi tu veux ? L'enfant, les cheveux dans l'air, continuait de courir dans la pièce dans tous les sens. Sa mère qui essayait de travailler fut saisie d'une nausée tellement sa fille ne s'était pas arrêtée de bouger depuis plus de deux heures à présent. Le pire c'est qu'elle n'était pas du tout fatiguée. Elle était tellement énergétique que sa mère attendait le moment de l'explosion. La tête plongée dans ses bouquins de médecine, elle tendit à tâtons la jambe qui servit d'obstacle à la course de sa petite fille. Cette dernière trébucha et tomba par terre tête la première. Elle explosa en larmes ne pouvant se relever ou voulant plutôt que sa mère vienne la réconforter. Mme Hutchinson, comme si de rien n'était ne bougea même pas continuant de lire son bouquin. Oui disons qu'elle avait des méthodes assez particulières pour élever sa petite fille. Etant une mère célibataire et travaillant à plein temps ce fut extrêmement dur de s'occuper d'une enfant tout seul et pire encore un enfant hyperactif. Car oui Pi était atteinte d'hyperactivité en même temps ça crevait les yeux vu son comportement et son énergie beaucoup plus élevée que la moyenne. Mme Hutchinson refusait cependant de demander de l'aide à quiconque. La dépendance, elle détestait cela énormément. Elle éleva donc sa fille toute seule. Elle l'enfermait dans sa chambre quand elle partait à l'hôpital et la libérait pour la laisser galoper comme une malade en toute liberté dans le salon, le soir. Oui c'est horrible, j'en suis consciente. Et d'ailleurs Mme Hutchinson était bien trop intelligente pour laisser une de ses connaissances se rendre compte de cela et appeler les services sociaux. Elle était consciente qu'elle pourrait perdre son enfant facilement et la simple idée de vivre sans son punch-ball, sa petite chérie Pipi était inconcevable.

Mais arrête quoi tu peux pas m'abandonner comme ça après cette nuit. C'était magique. C'est bon, on a baisé c'était bien mais on va pas en parler toute la journée alors lâche-moi maintenant. Laissant échapper un soupir désespéré, je me libérai de son étreinte avant de quitter l'appartement rapidement. Non vous ne rêvez pas, JE l'avais largué, abandonné après une nuit qui n'était pas trop mal d'ailleurs. Oui navrée de briser les jugements et les stéréotypes bâtis par la société capitaliste et mensongère qui consistent à toujours placer la femme dans une situation faible en la rendant de plus en plus soumise. Je ne jouais pas du tout à la petite salope désirable ou mangeuse d'hommes c'était tout simplement moi, c'était ma nature, rien de plus. Je ne pouvais ressentir la moindre chose, la moindre étincelle. J'aimais le sexe bien évidemment ; qui est-ce qui n'aime pas une bonne partie de jambes en l'air d'ailleurs ? C'est juste que discuter après tout en se complimentant, prendre un petit déjeuner ensemble ou pire encore s'échanger nos numéros allait tout simplement tout compliquer. Et les choses compliqués ne devenaient plus attrayantes à mes yeux. Je montai rapidement dans ma vieille Jeep et conduisais jusqu'à la maison. Ma mère n'était sûrement pas encore rentrée, elle m'avait dit qu'elle allait être de garde à l'hôpital la veille. J'en profitai donc pour boire un bon café et fumer tranquillement. Elle avait toujours détesté le fait que je fume ou encore ma dépendance dangereuse au café. Je m'en fichais. J'étais nihiliste et pour moi la vie n'était donc qu'une partie de plaisir. On ne vit qu'une fois, alors autant en profiter. Ce monde est absurde, dénudé de valeurs et morales alors pourquoi se casser la tête à suivre le troupeau ? Je nage contre le courant, je l'ai toujours fait. En même temps, je n'ai jamais été normale ou comme les autres. Je n'avais jamais connu mon père. Ce dernier - un interne à l'hôpital sûrement - avait couché avec ma mère et avait disparu tout de suite après comme par magie en se rendant compte qu'elle était enceinte. Personnellement, j'ai toujours trouvé que c'était de sa faute. Je ne le lui ai cependant pas dit. Je n'aimais pas lui faire mal, c'était après tout ma mère. Elle avait été dupe, imbécile comme toutes les autres filles et femmes d'ailleurs. Elle avait cru à l'amour, à ce sentiment irréel et inventé pour être commercialisé. Ne se rendait-elle pas compte que ses peines et son coeur brisés rendaient les inventeurs de l'amour encore plus riche ? Que c'était leur but d'épandre cette rumeur qu'est l'amour telle une épidémie pour qu'elle anéantisse toute la nation ? Moi, je m'en étais rendue compte. Pi s'en était rendue compte. Oui la petite Pipi qui n'avait jamais eu un foyer normal, stable. Qui n'avait jamais pu se rendre à un restaurant pour dîner en famille. Qui a du zapper toutes les danses père/fille n'ayant personne d'autre pour l'emmener. Mais tout ceci m'avait rendu encore plus forte. Enfin... je crois. Disons que cela ne m'avait jamais vraiment dérangé énormément. A vrai dire je n'y avais pas pensé. Je ne pris pas le temps d'y penser. J'étais vivante, canon, riche et je comptais en profiter. Disons que mon côté "anormal" m'avait aussi beaucoup aidé. J'avais été non seulement un enfant hyperactif mais je souffrais aussi de troubles bipolaires. Ah oui, je suis pire que lunatique. Je peux changer de "bord" émotionnel en moins de deux minutes. D'ailleurs j'avais frôlé la schizophrénie et c'est bien pour cette raison que je consulte jusqu'à maintenant un Psychiatre. Le fait d'être schizophrène ou pas ne me dérangeait guère. Ce serait vraiment marrant d'avoir deux personnalités et je pourrai enfin avoir une raison valable pour justifier le fait que je parle de moi même à la troisième personne du singulier. Le fait que je sois ainsi résultait sûrement de mon enfance et aussi ma naissance peut être. Sincèrement, je l'ignorai et je m'en contre fichais. Bref. Cette année là je venais de faire mon entrée dans la faculté de médecine de New York. Ma mère m'y avait obligée. Elle était médecin et la tradition exigeait que je suive le même chemin. J'étais passionnée par les pingouins donc personnellement si on m'avait donné le choix j'aurais sûrement choisi de me casser d'ici et élever des pingouins rastas en Jamaïque. Et puis je n'excellais en presque rien d'autre à part en langues - oui je parle plusieurs langues, c'est ma plus grande fierté après mes seins. Enfin bref voila vu que ça allait faire le bonheur de ma mère, j'acceptai. Je m'en contre fichais vraiment de la médecine: je n'aimais pas cela et je ne le haïssais pas non plus. Je n'avais pas d'excellentes notes donc ma mère dut user de ses connaissances pour m'y faire entrer. Te voila enfin. Grouille tu vas être en retard à ton premier cour d'Anatomie et puis c'est quoi cette tenue ? La voix de ma mère me sortit violemment de mes pensées et je fis une grimace suite à sa remarque avant de lâcher en montant dans ma voiture: T'inquiète maman, je suis encore vierge. Et j'y vais avec ma voiture, on se verra là-bas.


Oh non ma voiture, ma voiture ma belle voiture. Les yeux grand ouverts, je criais de toutes mes forces me retenant de sauter sur les policiers en face de moi et les bouffer. Oui vous avez deviné. On avait fait faillite. Et pourquoi ? A cause de ma mère et sa folie parfois bien plus élevé que la mienne. Elle avait parié avec un collègue à elle sur la partie de foot Irlande-Bretagne et avait donc tout perdu. Oui, on était devenu pauvres. On avait tout perdu littéralement. Pas de maison, pas de voitures... on me prit même mon paquet de cigarettes. L'horreur. On passa la première semaine chez une amie à ma mère heureuse de nous accueillir. Mais comme ma génitrice n'aimait pas du tout être dépendante des gens, elle m'obligea à travailler afin qu'on puisse enfin se louer une maison quelque parts. Cette année là, j'étais en dernière année de Médecine faisant ma spécialité de sexologue. Oui oui ma mère avait failli m'étrangler en se rendant compte du choix que j'avais fait. Elle voulait que je suive sa trace, que je devienne gynécologue à mon tour. Elle rêve oui. Je préfère crever plutôt que passer ma vie la main plongée dans des vagins dégueulasses. Sexologue était tout simplement parfait. Un travail qui payait bien, qui était amusant et qui me procurerait sûrement du... plaisir. J'aimais tellement ce que j'étudiais - en même temps j'y excellais - que j'eus obtenu directement une bourse pour mon stage à un des meilleurs hôpitaux de San Diego. Ma mère fut extrêmement ravie et d'ailleurs elle insista même à m'y accompagner. Mais c'est après plusieurs discussions bien longues et ennuyeuses qu'elle accepta enfin de me laisser partir seule, de prendre mon envol - comme elle le dit souvent " Oui Plum il est temps de prendre ton envol, tu es tellement légère en même temps". Je sais. Excusez son humour pourri. :étrange: Je n'avais donc pas d'argent, j'étais vraiment fauchée; pas de voiture, ni de connaissances à San Diego : juste mon diplôme de sexologue et moi. San Diego, here i am. :zupirman: