Le Debut de La Fin
Saskia j’ai quelque chose à te dire… Tiens qu’entends-je ? Je n’aimais pas cette phrase, aucun enfant aimait cette phrase, ni même un adulte. Lui faisant un grand sourire pourtant inquiet je lui dis
'' Maman, y a quelque chose ?'' . Quelle question ! C’était presque même déplacé de la poser. Bien sûr qu’il y avait quelque chose, il y avait toujours une moisissure qui s’amplifiait depuis que papa le grand cardiologue faisait des magouilles. Lesquelles exactement, j’étais ignorante. Il parait qu’il fallait mieux, les discussions tacites à la maison c’était courant. Et quand je boudais, car je ne comprenais pas ce qu’il se passait, mon père ressassait son vieux discours que je connais que trop bien, un peu trop même, comme si les mots n’avaient aucune signification.
''Saskia, c’est pour ton bien. C’est les affaires des grands. Tu comprends ? ''.
''Papa, ne me parle pas comme si j’avais cinq ans.''''Oh j’avais oublié que ma petite Saskia est plus mature que son âge. Mon dieu ! D’ailleurs le professeur m’a dit que tu avais d’excellents résultats.'' Papa, fait pas cette tête-là, je ne deviendrai pas médecin .
"Sasky’, je sais voyons. Nous savons tous les deux que c’est le domaine de papa et que c’est dangereux.’’. Tacite j’avais dit ? Ouais c’était peut-être plus que ça, c’était complètement malsain même. En pleine volée ma mère déballa la nouvelle, qu’elle devait me dire depuis un moment
" Voilà, demain on part en Russie, non ce n’est pas pour mon boulot de Journaliste, non je ne sais en aucun cas combien de temps on va y rester et encore non Saskia il n’y a pas d’autre issue.’’ Tout ça me paraissait si soudain, pourquoi d’un coup comme ça ? Une explication, j’en veux une, j’ai dix ans peut-être mais j’en veux une. Ce n’est pas si grave si je ne la comprends pas, mais pour une fois dites ce qu’il en est. C’est grave, catastrophique, irrécupérable, trou noir béant intersidérale ? Je ne savais pas. Maman tu oses me regarder avec ses yeux ? Ses yeux qui commençait à me dire "je suis désolée ma chérie. "
Je tripotais le bracelet qu’Abu m’avait fait à l’anniversaire de mes quatre ans, Maman me regardait désolée, Papa ? Oh lui il baissait les yeux.
"Sasky’ tu entends, Aller on va faire ta valise, t’enverra une lettre à Abu et puis vous aller vous écrire. Hein." Y avait de quoi faire une crise de Pré ado à ce stade-là. Je montais dans ma chambre, en faisant grincer les escaliers en vieux chêne pour marquer mon mécontentement. La nuit était tombée, les branches qui se reflétaient sur le mur de ma chambre me faisant penser à des mains aux ongles acérés, avide de me faire souffrir. Un peu comme la révélation d’aujourd’hui. Me couchant dans mon lit, j’entendis des murmures. J’ouvris la porte doucement, Maman, Papa ? Ils se disputaient ? J’entendais partiellement ce qui se disait. Un coup c’était " tu ne te rends pas compte, elle a dix ans.", Et puis un autre morceau ‘’ Oui elle a dix ans et ? Ici à San Diego on n’est pas du tout en sécurité. " Puis après plusieurs perturbations, les esprits s’échauffaient. En conclusion si j’avais tout compris, on partait en Russie à cause de Papa, il avait fait encore des magouilles, lesquelles ? On savait pas. On n’était en danger. Ma mère lui reprochait de faire dysfonctionner le cadre familial. Elle en avait marre comme elle le disait, mais elle l’aimait.
RUSSIAN HOSPITAL
Voilà aujourd’hui, jour pour jour cela fait une semaine que je suis en Russie. Premier point, même si j’avais visité un grand nombre de pays, la Russie… Il faisait tellement froid et puis je ne connaissais rien. Même pas la langue. Oui c’était mon dernier argument avant de quitter la maison, à quoi ma mère avait répondu,
"Tu vas apprendre et puis nous savons toutes les deux que tu t’adaptes extrêmement vite Sasky’ ". Les yeux bouffis par les larmes je bégayais que je ne voulais pas partir, que j’avais entendu ce qui s’était dit dans la chambre et que la Russie n’y changerai rien. Oui si nous sommes poursuivis ça ne s’arrangera pas. Ma mère ne répondit rien. Pas besoin, nous savions toutes les deux la réponse. D’ailleurs la suite des évènements montre bien ce que nous craignons. La Russie à en aucun cas changé notre situation. Il y avait de nouvelles règles, la première était que je ne devais jamais sortir toute seule, pour l’instant ça me parait respectable surtout à mon âge, la deuxième est que je devais m’abstenir de donner mon vrai nom de famille et par occasion mon prénom.
A l’école c’était donc pas facile, enfin Papa c’était débrouillé pour les papiers comme il disait toujours. Puis un jour, un Monsieur me demanda mon nom dans la rue comme ça d’un seul coup et ce jour-là j’étais seule, maman avait eu une urgence pour son travail et ma grand-mère n’était pas en état de venir me chercher. Je commençais à paniquer.
" Euh, je m’appelle Sigrid, oui Sigrid. "Le monsieur fit une grimace étrange, il me demanda si j’étais sûre ? Ohlalala c’était vraiment mal parti, je faisais quoi, je jette mon sac et je pars en courant ? Pas le temps de réfléchir, il me dit calmement.
" Bon Sigrid, enchanté, on se reverra surement. " J’étais bouleversée, mes parents me demandèrent ce qu’il s’était passé. Au début je ne voulais rien dire, mais ma mère me dit que si je ne parlais pas, ça pourrait me nuire et à eux aussi. Je déballais tout. Le visage de mon père se figea. Son visage devint rouge écarlate, il cria alors
"Tu vois Kristin, qu’est-ce que je t’avais dit. Il faut interner la petite. Elle sera en sécurité, j’ai un ami docteur de l’autre côté de la ville, il s’arrangera de faire interner Saskia sans pour autant qu’elle suive ces traitements qu’on donne à ces fous… ". Avais-je bien compris ce qu’il venait de dire ? Je regardais ma mère désespérée, mais Maman dit lui quelque chose, que toute cette mascarade à assez durer, que c’était trop gros, trop sorti d’un très très mauvais film. Stop. Ma mère acquiesça de la tête. Elle rajouta qu’il fallait que je limite les lettres que j’envoyais à Abu, sait-on jamais peut être que mon père avait aussi des ennemis à la poste … Ridicule.
De ce fait j’ai dû rester à l’hôpital psychiatrique, alors que je n’avais strictement rien, bien sûr je ne recevais aucun médicament, je recevais des cours particuliers car j’avais un très bon niveau à l’école de plus on ne me prenait pas pour une folle, enfin … c’est ce que je croyais, je crois … Je ne sais plus. Je pense être resté un an, Maman dit 4 mois, Papa dit 7, Je ne sais plus non plus. Conclusion quand je suis sortie de cette horreur, j’ai commencé à détester tout le monde médical tous, sans exception.
JAWS
Le temps passait, les affaires foireuses de mon père empiraient. Je ne disais rien, j’en avais pas le pouvoir et l’envie n’y était pas. Après ma sortie de l’hôpital, j’ai commencé à avoir des crises d’angoisse dès que je voyais le bâtiment en question. Oui car j’avais une peur bleue d’y retourner et de ne pas savoir quand j’y sortirai. J’étais révoltée, complètement, depuis cet enfermement. J’avais demandé à plusieurs reprises à quoi cela avait servi à part me lobotomiser complètement le cerveau et peut-être ma personnalité en passant. Mon père répétait qu’il voulait brouiller les pistes. Quelles pites ? Il se fou de moi ? Donc si je réfléchis deux secondes, je suis une sorte d’appât sans défense bête à manger du foin, c’est ça ? Dès ce moment, je n’écoutais plus les règles. J’étais rentrée au collège et maintenant je voulais m’y rendre seule à l’école, et de plus je donnais mon vrai nom à présent. Oui rien à foutre. Le soir quand je rentrais mes parents se disputaient, à mon sujet. Ma mère disait que j’avais complètement pété un câble, que ça n’allait plus, que je répondais, que j’étais différente. Je la regardais d’un air agacé.
« La seule chose que j’ai à dire, c’est que je ne vous souhaite pas ce que vous m’avez fait endurer… » Oui c’était lâché, malgré que j’étais admirative au sujet de ma mère, et aussi de mon père qui m’aimait tout de même. J’avais l’impression que le départ en Russie, l’hôpital tout ça c’était du vent, un peu comme si c’était un remplissage de nos misérables vies, qui ne l’était pas autant vu l’argent que mon père rentrait, sale ou pas … Tension toujours palpable à la maison, je n’imaginais pas un jour que ça serait pire, ça le fut quand mon père appris que je donnais mon vrai nom, que je ne faisais plus d’efforts et que je quémandais quotidiennement de quitter la Russie pour de bon.
Un matin, je partais au collègue en trombe, j’étais en retard et j’empruntais alors la petite ruelle parsemée de lierres que ma mère m’interdisait de prendre. Tout d’un coup l’homme qui m’avait demandé mon nom il y a déjà un bon moment réapparu, je l’ai tout de suite reconnu. D’ailleurs à l’époque son visage m’avait terrifiée.
« Coucou Singrid, ou plutôt Saskia non ? Alors j’ai tenu ma promesse. Tu as bien grandi dit donc… » Et Merde, Et Merde et encore Merde, je commençais déjà à suffoquer, non je ne voulais en aucun cas faire un séjour à l’hôpital à cause de cet homme. J’étais pétrifiée. Le bandit rajouta
« Ben voyons, on tremble maintenant ? Bon assez discuté, je n’aime pas trop qu’on se paye de ma tête compris ? Je n’ai pas du tout aimé les manières de ton scélérat de père. » Oui ben je suis désolée, on ne choisit pas sa famille, d’ailleurs qu’est-ce que j’en avais à faire qu’il n’aimait pas ses manières. Pourquoi me parlait –il de ses lamentations ? Comme si je pouvais y faire quelque chose. Cretin.
« Eh, je te vois venir. Petite, tu penses que je joue ? Ça me fait rire, en tout cas tu as nettement plus d’assurance que la fois passée. Bon ce n’est pas tout, mais les affaires sont les affaires. Œil pour Œil, Dent pour Dent. Comme on dit n’est-ce pas ? Qu’est-ce qu’il baragouine ? Bref il me laisse tranquille je trace mon chemin. Quand tout d’un coup, une sorte de voiture noire arrive en furie et s’avance à toute vitesse vers moi, je ne comprends pas tout de suite. Œil pour Œil il avait dit. La voiture se dévie et moi par réflexe ou par peur ou je ne sais quoi, je dévie sur l’autre trottoir en me fracassant la tête sur le bitume. Qu’est ce qui s’est passé ensuite ? Pas possible de s’en rappeler, la douleur était juste inimaginable. J’étais peut-être morte après tout ?
MA DYNAMITE ET MOI
« Oui je sais Monsieur, oui moi aussi je suis médecin. Oui on n’a fait tout ce que vous avez dit… Si elle va bien ? Son état est stable, mais ce n’est pas gagné d’avance, Une partie est endommagée, comme on pouvait s’en douter. » .
« Et, elle qui ne supporte plus les hôpitaux … Elle va complètement paniquer … Il faudra l’opérer docteur ? » Le docteur opina de la tête. Il expliqua à mon père que c’était même urgent. Je me réveillais, je paniquais, je criais, mon père essayait de me calmer en me disant que je n’étais pas internée. Bonne nouvelle ? Alors pourquoi j’avais ce mal de crâne ? Mon père m’informa de la situation. Je lui racontais comment ça c’était passé. Il restait figé. Félicitations Papa, indirectement avec tes merdes tu avais officiellement failli tuer ta fille. Maman n’étais pas là, elle était retournée à Paris pour voir de la famille, puis si je me rappelais ce qu’elle avait dit, elle serait au Laos pour un reportage, d’ailleurs je devais l’accompagner. Elle devait donc revenir bientôt et voir les dégâts … Si j’avais bien compris tout ceci ne finirais donc jamais ? Je pleurais, j’avais mal, j’avais peur et surtout je me sentais seule. Mon père me regardait désemparé par la situation plus que tragique. Je le regarde méchamment.
« Tu as vraiment de la chance que je t’aime malgré tout. T’entends ! J’espère que Maman te pardonnera ce que tu viens de faire. Tu l’as dit toi-même on n’est une famille. J’obéissais à tout, mais je te préviens que si je sors de cet hôpital, on part d’ici, on invente un bobard à la mère de maman et surtout on essaye de vivre la vie qu’on avait avant. Car là on ne vit pas, on ne survit même pas, on n’est mort papa, tu m’entends ?! Ne pleure pas. Je suis là, tu es là. » Il me répondit que Promis on quitterait ici, je soupirais, enfin, il aurait fallu que j’ai un choc à la cervelle pour qu’il réagisse. A ce moment-là, le docteur rentra dans la chambre, il nous expliqua tout dans les détails. Comme quoi, une partie de mon cerveau avait eu un choc, pas assez grave pour qu’on s’en apercevoir tout de suite mais assez pour que je sente cette douleur intense et aussi les conséquences qui ne devraient tardés. Quelles conséquences ? Le neurologue ne se faisait pas attendre. Il me répondit que j’aurais des périodes d’amnésie partielles. Il sortit plein de mots compliqués que mon père lui-même devait connaître probablement, je ne sais pas sauf que moi je comprenais rien. Mon père m’expliqua que j’aurais juste du mal à me rappeler de certaine chose à certains moments, mais des choses bénignes, comme par exemple à quelle heure passe cette émission ? Il se foutait de moi là ? Je rêvais, des choses bénigne, j’étais un mini légume tu pouvais le dire. Le docteur, me rassura que ça ne serait que temporaire, qu’en plus mon père lui avait dit que j’étais excellente à l’école que rien n’y changerai, sauf qu’avec ces absences je serai perdue. Il ajouta que tout ceci serait qu’un mauvais cauchemar après une opération. D’accord, mais ce n’était pas trop beau pour être vrai ? Si ça l’étais car il m’appris que l’opération se ferai en deux fois, une fois maintenant et une autre et une autre opération quand j’aurais l’âge d’être à ma première année de lycée ( pour éviter les complications ou les mauvaises surprises ? ) . Quoi ? Il était en train de me dire que j’allais être comme ceci pendant deux ans et demi c’est cela ? Voyant mes yeux larmoyants, mon père dit
« Saskia, n’oublie pas ma promesse et puis tu devras faire une rééducation après cette opération, puis jusqu’à la date de la prochaine et puis enfin après pour te remettre sur pied, t’inquiète pas tout ira bien. » Il essayait de me rassurer, c’était raté. Je ne répondis rien.
Caliiiifornia Here We Go !
Après le retour de ma mère complètement effrayée par la situation et y avait de quoi, l’opération se passa bien. J’ai dû me faire violence et aller faire des séances hebdomadaires de rééducation au centre médical. Mon père a un peu arrêté ses magouilles, mais bon vous le savez tout comme moi, ces milieux- là on n’en sort jamais idem. Ce qui signifie qu’il doit surement rendre des comptes et en régler aussi. Mais cela n’est plus mes histoires, en tout cas pour un laps de temps. Ah et bonne nouvelle, j’ai enfin quitté la Russie, nous avons emménagé à Baltimore là où j’étais née, mais maman a dit que ce n’était pour qu’un temps. Je suivais toujours la rééducation et j’avais quand même la chance d’avoir la plus géniale et la plus belle meilleure amie au monde, dénommée Bianka. Elle voyageait beaucoup, j’essayais de la rejoindre quand ma mère avait du boulot dans tel ou tel pays et que Bianka s’y trouvais. Sinon les nouveaux moyens de communication étaient nos précieux. Et puis les conneries de mon père elle en savait une partie, j’avais besoin d’elle. Après pas mal d’agitations, et un retour aux sources ma première année au lycée commençait (nous avions déménagés de Baltimore et étions partis plus vers L’ouest, je priais pour que maman cède à se réinstaller à San Diego) ce qui annonçait la seconde intervention et surtout la presque fin du calvaire. D’ailleurs j’écrivais tout sur des carnets, pour me rappeler certaines choses qui pouvaient m’échapper, l’infirmière avait dit que c’était une bonne idée. Soit. L’opération réussie, je devais poursuivre la rééducation. Sauf qu’au début j’étais assidue et puis avec le temps, les copains, les amies, l’envie de faire les mêmes choses que les autres, de ne pas se sentir différent, cool même.
J’ai commencé à sérieusement déconner, enfin c’est peut-être exagéré, j’ai eu deux années de décadence totale, dont je ne préfère pas parler. Et bien entendu ça je m’en rappelle. De plus les magouilles made in San Diego (oui maman a cédé) avec mon père reprirent de plus belle. Mais maintenant je n’étais plus la cible, après mon accident, soit disant je ne servais à rien, mon père ne déborderait pas. Espérons-le. Bref je me suis cherchée, peut-être pas encore trouvée. Après tout ça faisait longtemps que je devais faire semblant d’être comme ci et comme ça. J’étais en train de me découvrir et c’est vrai que ce n’était peut-être pas joli, joli. Heureusement à mon année de Terminale, je me suis quelque peu, je dis bien quelque peu assagie. Ah Carnet, j’ai presque oublié de te dire qu’en me cherchant, j’étais toujours obligée de mentir car pas mal de personnes de San Diego connaissait notre famille et plus précisément mon père. Sinon ça fait bientôt 6 ans que je fais de la guitare , c'est ma passion, et je t'avoue que pendant les moments où sa ne va pas elle est là , j'en parle jamais , car c'est ma précieuse à moi . Passons, j’ai passé mon bac avec succès et je poursuis désormais des études d’économie. Ah et j’ai toujours besoin de ces fichu maudits carnets puisque pendant mes ‘’ années folies ‘’ j’ai refusé catégoriquement d’entendre le mot rééducation.