« Maman, t'es là ? Est-ce que je... » Je n'ai pas pleuré. Je ne pleure pas, moi. Mais ça m'a fait un choc. De découvrir son corps inerte. Elle était couchée sur son lit. Comme si elle dormait. Sauf qu'elle ne respirait plus. Elle avait rendu l'âme. J'avais passé seize ans de ma vie seul avec ma mère. Je savais qu'elle était atteinte d'une grave maladie et que ses jours étaient comptés. Mais jamais je n'avais imaginé qu'elle m'abandonnerait si tôt. J'avais presque réussi à oublier sa maladie. Elle semblait être en forme ces derniers temps. À première vue, ce n'était qu'un leurre. Une illusion. Pour éviter que je ne m'inquiète. Et elle avait réussi : je pensais que tout allait pour le mieux. Je n'avais plus pensé à sa maladie depuis près de deux semaines. Mais cette maladie l'avait emporté. Et jamais plus, je ne verrais le sourire de ma mère. On emporta son corps, on me demanda si j'avais de quoi payer l'appartement ou alors, un membre de la famille chez qui aller. Maman avait toujours vécue seule avec moi. Elle avait eu quelques petits amis bien sûr, mais je les avais rapidement fait fuir. Cela pouvait paraître égoïste, mais je ne voulais pas d'hommes dans la vie de ma mère. Du moins, je voulais un homme qui soit assez bien pour elle. Et ces hommes qu'elle avait ramené, je les détestais plus que tout. Ils n'avaient rien dans la tête. Ils n'avaient rien pour eux. Ma mère méritait mieux qu'une bande d'abruti dans leur genre. Alors, si j'avais quelqu'un qui pouvait m'accueillir sous son toit... ? La vérité, c'était que oui, il y avait quelqu'un. Mon père, que j'avais retrouvé récemment. Et qui ignorait qu'il avait un fils d'ailleurs mais ça, je m'en fichais. Il ne s'était pas montré hostile à mon égard, au contraire. « Papa ? C'est Neal. » Je marquais un temps d'arrêt. Je n'étais pas sûr qu'il accepte de m'héberger. Après tout, il avait déjà une fille à sa charge. Alors voir son fils débarquer à la maison... « Maman est morte. » Je l'avais dit comme si cela ne m'affectait pas. C'était faux, bien entendu. Mais c'était juste ma façon d'être. Je paraissais léger, on pensait que je ne prenais rien au sérieux. Ce que j'étais loin d'être. « Viens à Paris. » La semaine suivante, je frappais à sa porte.

« Un aller simple pour la Californie s'il vous plait » J'étais a l'aéroport Charles de Gaulle. Après près de neuf ans passés a Paris j'étais prêt a retourner a ma ville natale. Mon déménagement chez mon père fut difficile au début, il essayait de me dompter et je détestais cela. Puis un terrain d'entente fut installé. Je suivais des études artistiques, l'unique chose qui me passionnait et dans laquelle je me donnais entièrement. Mon père m'encourageait vivement, comme pour se rattraper et se faire pardonner les seize années d'absence. Je ne lui en voulais pas, du moins plus maintenant. Il avait succombé a son cancer deux ans plutôt, et m'avait confié d'une sincérité bouleversante, que de ne pas me voir grandir était le plus grand regret de sa vie. J'étais a Paris, dans un immense appartement a Montmartre, ou les fêtes alcool et drogues ne finissaient pas d'entrer et de sortir. Je voulais me détacher du monde, oublier la misère -mentale- qui m'entourait. Puis je me suis repris, finissant mes études, je voulais changer de cadre, commencer autre chose sur des nouvelles bases. Mon arrivée a San Diego était le grand plan de ma vie, et depuis les deux ans de ma vie passées ici, je ne regrette rien pour une fois.