✖ Il avait tout essayé. Il s'était vengé sur sa bouteille de vodka mais ça lui avait donné la nausée. Il avait tenté de fumer ce qu'il avait chez lui et d'illégal ; ça n'avait rien fait. Il avait voulu se consoler avec diverses conquêtes. Mais chaque nuit, il avait été impuissant, il n'avait rien pu faire, il n'avait jamais pu aller au bout avec les filles qu'il avait fait venir chez lui. Jamais. Ses pensées étaient occupées par la belle blonde qu'il avait durement et injustement il y avait maintenant deux semaines. Oui, quatorze jours où le beau brun avait vécu un enfer sans nom. Sans la présence de Marley, ses cauchemars revenaient. Il se réveillait en sursaut toutes les nuits. Le manque de sommeil avait dessiné des cernes violacées sous ses yeux endoloris. Il n'avait aucun remède. Enfin, si, il y en avait bien un. Mais il l'avait repoussé. Marley. L'idée qu'il lui fasse pitié l'avait, comme prévu, hanté de longs jours durant. Et le hantait toujours d'ailleurs. C'est ainsi qu'il s'était retrouvé devant sa porte, après avoir cherché son adresse sur internet. Il avait cédé. Il avait abandonné. La vérité était là devant lui : il ne pouvait pas survivre sans elle. Il n'y arrivait plus. C'était comme d'avoir rencontré une étoile, d'avoir été ébloui. A présent, il ne voyait plus rien ; tout lui paraissait sombre et morne. Il tremblait comme un adolescent. Il allait se prendre au moins des baffes, mais ce qu'il craignait le plus était ses mots. Il frappa doucement, son visage sérieux et torturé témoignant de la douleur qu'il portait en lui et qu'il n'avait plus envie de cacher. Il avait essayé de résister, il avait échoué. Que faire d'autre à présent ? Il attendit avec appréhension qu'elle ouvre, priant pour qu'elle ne lui ferme pas la porte au nez directement.

✖ Elle ouvrit et il craignit sincèrement qu'elle referme la porte immédiatement. Mais elle semblait trop choquée pour réagir, et restait là, plantée devant lui, la bouche ouverte, le regard rivé sur lui. Elle était surprise. Elle ne s'attendait pas à le voir là. Donc elle l'avait crue. Quel bon comédien il était devenu.. A peine eut-il croisé ses iris bleus qu'il sentit son coeur battre plus vite. Il passa une main hésitante et tremblante dans ses cheveux bruns pour les ébouriffer. Le silence ne dura que quelques courtes secondes et pourtant, il semblait à Orphée qu'il s'écoula des heures entières. Comme elle lui avait manqué. La voir là devant lui le lui faisait réaliser vraiment. Il se racla doucement la gorge mais ne réussit pas à parler. Il poussa un soupir, se frottant nerveusement le bras. Il sentait une boule dans sa gorge qui l'empêchait de murmurer quoi que ce soit. Il avait peur que sa voix ne se brise et ruine son masque qu'il avait mis tant d'années à mettre en place. Finalement, il inspira à fond et ancra son regard dans le sien. Dans ses yeux était lisible tout le désespoir qu'il portait. « J'y arrive pas, Marley ... » Elle ne comprendrait certainement pas. Mais il n'avait pas la force de s'expliquer. Toujours immobile, comme paralysé, il la regardait, presque suppliant. Une baffe, voilà ce qu'il allait récolter.

Certes, elle avait peut-être gâché la relation qu'ils avaient en en voulant une autre. Mais quoiqu'il en était, Fowkes n'avait pas le droit de lui en vouloir. Pas le droit du tout. C'était un incapable, égoïste, enchaîné dans son passé qui ne pensait qu'à son petit monde égocentrique. Quelle belle description. Elle semblait abasourdie par sa présence ici et sa déclaration qui n'était pas du tout explicite. Néanmoins, elle le fit entrer. Il hésita quelque peu, fronçant les sourcils, protestant presque mais finalement... il passa le seuil de la porte. Il s'émerveilla rapidement de l'intérieur. Jamais il n'était entré dans une maison aussi spacieuse, aussi belle. Lui qui avait toujours vécu dans un deux pièces. Que foutait-il là ? Rien qu'à ce niveau-là, il ne la méritait pas. Il la suivit un peu dans la cuisine, marchant à pas feutrés comme s'il risquait d'abîmer le carrelage. « Non merci. » répondit-il poliment, d'une voix éteinte. Il n'avait pas envie de boire quoi que ce soit, cette ambiance tendue le rendait des plus nerveux. Elle attendait, et ça se voyait. Cette fois, c'était à lui de se lancer, à lui de se jeter à l'eau. Il chercha ses mots, se mordillant la lèvre. Il ne savait pas par où commencer. « J'ai essayé de me passer de toi. Mais j'y suis pas arrivé. » commença-t-il alors, les yeux baissés. Mais il se rendit vite compte qu'elle allait sans doute penser qu'il parlait de son corps. Il secoua la tête avant d'oser enfin relever ses yeux vers elle, cherchant son regard. « Ce que j'ai dis est faux, Marley. T'es bien plus qu'un... simple plan cul. »

oublié de te le dire, mais ton kit est sublime.

Le silence résonnait dans ses oreilles au même rythme que les battements de son coeur, qui criait le nom de la blonde à chaque boum-boum. Il ne comprenait même pas qu'elle l'ait fait rentré et qu'elle était presque courtoise avec lui. S'était-elle finalement accrochée à un ultime espoir qu'il revienne sur ses mots ? Après ce qu'il lui avait dit ? C'était peu crédible, et pourtant... Avant qu'il puisse lui répondre, elle passa au salon et il suivit, comme un automate. Un véritable pantin, soumis à ses émotions, ses sentiments, qu'il ne contrôlait plus. Il ne contrôlait plus rien. Il s'assit donc à côté d'elle sur le canapé. Un bon mètre les séparait et il lui semblait être à des lieues d'ici. A des distances immenses d'elle. Comme s'il avait beau tendre le bras et qu'elle demeurait intouchable. Il chercha une nouvelle fois ses mots, tâchant de mettre le plus de sincérité dans ses paroles, même s'il était normal qu'elle doute de lui à présent. « Parce que... tu mérites mieux que moi. Je suis pas fait pour quelqu'un comme toi. Et je.. je te demande même pas que tu me refasses confiance, en fait, je sais même pas pourquoi je suis venu te dire ça, mais je voulais que tu le saches. » termina-t-il en haussant les épaules, la regardant à la dérobée, se retenant de tout son corps de ne pas briser la distance qui les séparait. Cela devenait difficile de la supporter, cette distance. Chaque partie de son corps voulait rencontrer celle de Marley.

✖ Il attendait sa réaction avec impatience. Et en même temps, il était drôlement angoissé. Elle avait raison. Elle ne pouvait plus lui faire confiance. Il trouvait des excuses, pas vrai ? Pour excuser le sans-coeur qu'il était devenu. Mais s'il était vraiment un sans coeur... pourquoi le sien lui faisait-il si mal à ce moment-là alors ? Il cognait dans sa poitrine comme un marteau. « Je comprends. » Que pouvait-il dire d'autre ? Comment pouvait-il la convaincre ? Après-tout, il n'était pas venu ici pour ça. Il se sentait minable. Plus bas que terre. Il posa ses yeux sur elle. Il avait envie de pleurer. « Je sais tout ça, Marley... Je ne sais peut-être pas qui tu mérites vraiment, mais je crois que ce n'est pas quelqu'un comme moi. J'ai trop longtemps vécu seul pour prendre soin de quelqu'un. » A quoi bon s'expliquer ? Il n'avait pas envie de raconter tout ce qui l'avait rendu comme ça. Pourtant, il s'avérait qu'elle était la seule à qui il aurait vraiment eu envie de le dire. Il baissa les yeux sous l'accusation qui saignait par les paroles poignantes de Marley. Il posa ses yeux dans le vide. Il n'avait rien pour se justifier. Pas d'alibi, pas d'excuse. « Je sais. Le travail de toute une vie que d'être un bon comédien. Si cela avait l'air si sincère, c'est parce que je pensais qu'en te blessant, tu te détacherais plus facilement de moi. Et que tu aurais la chance de pouvoir passer à autre chose. Mais ... » Il soupira et soudain, se rapprocha un peu. Sa jambe frôla celle de la jolie blonde mais il la décala, frémissant. « ... mais c'est moi qui n'ai pas réussi à me détacher de toi. Tu n'es pas rien, Marley. Sinon, je ne serais pas là. » N'était-ce pas vrai, au fond ?

✖ Il avait envie de se décaler, de la toucher, de l'embrasser, de venir enfouir sa tête dans son cou pour lui dire qu'il était désolé et qu'il ne recommencerait plus. Il avait envie de lui dire qu'il changerait, pour elle, si elle prenait le temps et la patience. Que c'était possible, qu'ensemble, ils y arriveraient. « Je comprends. » fut pourtant la seule chose qui sortit de ses lèvres. Sa gorge, nouée, refusait d'en dire davantage. De toute façon, il n'aurait pas pu être celui qu'elle décrivait. Il n'avait pas été élevé comme ça. Il n'avait pas été élevé du tout, en fait. Certes, son corps lui manquait. Mais pas que. Des corps, il pouvait en avoir très facilement. Personne ne lui résistait, personne ne se donnait la peine de le faire. Mais Marley, c'était différent. Au fil des jours, son corps ne lui avait plus suffit. Lui aussi voulait plus, même s'il n'avait jamais osé le formuler. Il ne la regardait pas, il n'y arrivait pas, il ne voulait plus. Il était faible face à elle, et ça le frustrait de devoir se montrer comme ça. « Oui, je comprends. » Il lâcha un petit soupir avant de tourner son regard sombre mais brillant vers elle. « Je te ferais souffrir, Marley. J'suis pas le genre de mec parfait pour une relation comme tu le veux. » lui affirma-t-il, franc et sincère. Fini les mensonges, n'est-ce pas ? Après-tout, il était clair que s'il l'avait déjà faite souffrir une fois, il recommencerait. Il baissa la tête, se la prenant entre les mains, silencieux ensuite, ne voulant même pas entendre ce qu'elle allait répondre à ça. Que pouvait-elle dire ? « Alors barre-toi d'ici » ? Sans doute, oui ...

Mais alors où est le problème ? Elle ne peut pas se passer de lui et il ne peut pas se passer d'elle. Ils sont prêts à tous les deux faire des efforts pour l'autre ... mais non ça va pas. A cause d'Orphée. Non mais je sais pas, il doit lui manquer une case à ce type parce que c'est pas normal là, si ? Il faut toujours qu'il foute tout en l'air de toute façon hein, vous me direz, normal, c'est un mec. Quoique y a des filles qui ont cette manie aussi parfois. Elle l'aime comme il est ? Moh, elle est vraiment trop chou. Mais cela n'attendrit pas notre brun ténébreux pour autant, qui reste de marbre, le regard rivé quelque part sur le sol entre le canapé et la télé. Son « je t'aime » résonne dans sa tête. Il inspire à fond et hoche la tête. « Avec moi tu es certaine de ne pas tomber dans la monotonie. Mais comment faire pour changer ? J'ai toujours vécu comme ça, Marley, avec un seul but : survivre, sans me soucier des autres. » Sauf de ceux qu'il aime. Mais ça, il ne le dit pas. Non, il ne le dit pas. Pas encore. Trop tôt. Trop dur. Et s'il la perd ? La pensée lui glace le sang mais il la repousse loin, très loin. Soudain, sans qu'il ne s'y attende, elle prend son visage entre ses mains. Il peine à soutenir son regard & s'y noie complètement. Alors, si elle est prête à être patiente, ça devrait le faire, non ? Peut-être. Son regard descend aux lèvres de la demoiselle et il se retient de justesse de l'embrasser. Il a réussi à ne pas se manger une claque jusqu'ici, il aimerait bien continuer. « Plus jamais. Promis. » Mais que vaut une promesse pour un mec comme Swann, qui a toujours vécu dans la précarité, seul, comme un voleur ?

S'offrir à elle ? Mais comment peut-il s'offrir ? Au fond, qu'est-ce que ça veut dire ? Lui révéler tous ses secrets ? Lui faire part de ses moindres côtés d'ombres, de ses pires vices, de ses plus profonds cauchemars ? Doit-il lui dire qu'il se réveille la nuit en hurlant le prénom de sa soeur ? Doit-il lui montrer sur son bras son prénom gravé au couteau dans sa peau ? Doit-il lui dire que c'est à cause d'elle qu'il ne veut plus s'attacher ? Qu'il a peur de ne pas savoir la garder, de ne pas savoir la protéger ? Doit-il lui avouer qu'il s'autodétruit tout seul, et que la culpabilité finira pas le couler ? Que celui qu'elle voit là n'existe pas ? Qu'il n'est qu'un masque, une façade, un décor qui s'effondrera comme le rideau d'une pièce de théâtre – quand le rideau tombe, et que les décors s'effondrent, on implore le cieeeel, dieu que la gloire est cruelle ? Non, il ne lui dit pas. Il ne peut pas. Pas encore. Peut-être ne lui dira-t-il jamais. Il n'en sait rien. Il ne veut pas savoir. Se concentrer sur l'instant présent. Comme il l'a toujours fait. Fermer les yeux, serrer les dents, et avancer. Il les rouvre et automatiquement, ses prunelles sombres se posent sur celles, claires et magnifiques, de Marley. Son coeur rate un battement mais il ne le montre pas. Il ne veut pas qu'elle voit qu'il est faible. Qu'elle a un pouvoir sur lui que personne n'a jamais eu. Alors il le cache. Encore. « Oui, on le regrettera. » répète-t-il bêtement. Parce qu'elle a raison. S'il part d'ici sans avoir tenté avec elle, il ira certainement sauter du pont de san diego. Elle prend sa main et le jeune homme n'oppose aucune résistance. Il est aussi fébrile qu'un enfant tombé du lit. Il a quinze ans, il vient de quitter la banlieue de Londres et il est faible. Comme si ces huit années n'ont pas existé. Il la regarde comme s'il la voyait pour la première fois. Se mordille la lèvre. Nerveux. Son regard le paralyse. Ne se rend-elle pas compte ? Non, Orphée, tu as tellement appris à tout cacher que plus rien n'est visible derrière ta muraille de chine. Elle s'approche. Qu'il s'en aille ? Il devrait, oui. Cela serait plus responsable. Mais là, il ne peut pas bouger. Ses pieds semblent étrangers et ne lui répondent plus. Mais pire que ça : il n'a pas envie de bouger. Son visage s'approche tant et si bien qu'il sent sur son visage s'échouer son souffle. Son parfum l'enivre. Prisonnier, il plonge dans son regard comme un naufragé dans l'océan que forme ses prunelles. S'il est prêt ? Non, il n'est pas prêt. Il ne le sera jamais. « Je suis prêt. » Regardez-moi le. Il ment comme il respire. Mais a-t-il le choix ? On lui a appris à vivre comme ça. Enfin non, on ne lui a pas appris à vivre tout court, plutôt. La distance se raccourcit. S'amenuise, s'use, se défile. La distance fuit, pour ne laisser entre leurs visages qu'une promiscuité troublante. Il contrôle sa respiration pour ne pas la laisser s'accélérer. Il a l'impression de la découvrir, qu'il ne l'a jamais vue avant, et que c'est la première fois qu'il est si prêt d'elle. Comme si le reste ne comptait pas. Il frôle ses lèvres et un frisson descend de ses omoplates jusqu'au bas de son dos, suivant le tracé précis de son échine. Il n'a toujours pas décroché son regard du sien. Et finalement, il pose ses lèvres sur les siennes. Et il ne truque pas, ça, il ne peut pas truquer. Peut-être y sentira-t-elle tout ce qu'il n'a jamais su lui dire. Tout ce qu'il taira à jamais. Ou peut-être pas. Il ignore ce qu'il préfère. Se concentrant sur leur baiser, il appuie sur ses lèvres un peu plus franchement, sa main glissant dans ses cheveux blonds et soyeux.

Et pourtant en même temps, il voulait tout savoir d'elle. Il voulait apprivoiser ses plus sombres secrets. Il voulait dompter ses peurs les plus menaçantes. Il voulait attraper ses plus farouches révélations. Il voulait... tout. Il la voulait elle. Mais il avait peur de mal faire. Peur de la blesser. Peur de ne pas changer. Peur de ne pas y arriver. Peur de ne pas être à la hauteur – être à la hauteuuuur – et de lui faire du mal. Il passa une main dans ses cheveux blonds. Ils étaient si doux, si soyeux. Il plongea dans son regard et à ce moment-là, peut lui importait s'il s'y noyait. Qu'il s'y noie, qu'il s'y noie ! Il posa alors ses lèvres sur les siennes et il sentit qu'elle prolongeait. Le désirait-elle aussi fort qu'il la désirait ? Au fond, est-ce qu'elle était totalement sincère dans ses paroles ? Swann n'en savait rien. Il ne voulait pas savoir. Il la serra alors contre lui, comme si cela pouvait effacer les paroles qu'il avait eu la dernière fois, même si cela ne serait pas suffisant. Peut-être même rien ne serait jamais suffisant. Peut-être avait-il brisé toutes ses chances ce soir-là en montrant quel habile comédien et menteur il était. Le croirait-elle de nouveau un jour sincèrement ? Quand elle lui demanda de lui promettre ça, il gardait ses yeux rivés dans les siens. Les détourner aurait prouvé qu'il allait mentir. Et il ne le souhaitait plus. « C'est promis, je te dirais tout. » Tout, tout... vraiment tout ? Allait-il lui avouer qu'il avait peur en s'endormant à ses côtés qu'elle ait disparu pour toujours au matin ? Allait-il lui dire comme il ne pouvait plus se passer d'elle au risque de passer pour un égoïste lâche ? Allait-il lui dire qu'eux deux, ça ne marcherait pas, qu'il le savait, qu'il en était persuadé, mais qu'il voulait tenter quand même ? Oui, allait-il vraiment lui avouer tout ça ? Il avait promis. Il n'avait plus le choix. Il caressa avec une tendresse rare chez lui ses longs cheveux, avant de venir l'embrasser sur la joue. L'ambiance qu'il y avait entre eux à ce moment-là, il ne l'aimait pas. Ce silence, cette tension muette, ces interrogations... c'était bien trop sérieux pour lui. Le brunet posa son regard obscur sur celui, clair, de la demoiselle. « Alors ça y est ? J'veux dire ... on est ensemble ? » déclara-t-il avec un sourire taquin, son tempérament léger reprenant le dessus. Il l'observait, ayant envie de briser cette ambiance figée entre eux.

Qu'importe les préjugés, qu'importe leurs idées noires, qu'importe son avis sur le futur de cette relation, il avait pris sa décision : il allait tenter. Il allait tenter, oui, et qui vivra verra bien où ça les mènerait hein ! Se prendre un mur de plus ne lui faisait pas peur. De toute façon, Orphée n'avait plus peur de rien sinon que de perdre ceux qu'il aimait. Et Marley en faisait parti. Il avait peur qu'il lui arrive quelque chose. Qu'elle ait un accident de voiture. Qu'elle se fasse tuer. Qu'elle tombe gravement malade. N'importe quoi, mais il avait peur oui, qu'il lui arrive quelque chose de fatal. C'est comme s'il se croyait atteint d'une quelconque malédiction, qui toucherait ceux qu'il aimait. Comme si le ciel voulait le punir de quelque chose en les lui retirant. Il espérait se tromper. Mais l'espoir n'était pas le meilleur ami de notre jeune londonien. Il décida donc de détendre un peu l'atmosphère et quelque part, craignit que ça ne dérange Marley. Mais apparemment non, puisqu'elle renchérit dans ce sens-là. Et Swann était infiniment plus à l'aise avec cette ambiance là que la précédente ! Il posa sa main sur celle de Marley qu'elle avait posé sur sa joue, s'approchant pour laisser son souffle effleurer son visage. Il eut un petit rire, souriant de nouveau. « Il faut que tu saches que je me réveille souvent en pleine nuit moi, et mon humeur n'est sûrement pas mieux ! » Il avait dit ça en rigolant, mais c'était vrai. Elle le verrait peut-être cette nuit-là. D'ailleurs, il lui sourit, prolongeant le baiser en la serrant fort contre lui, passant une main dans ses cheveux blonds. « Si tu veux bien de moi dans ton lit alors oui. » murmura-t-il doucement contre ses lèvres dans un souffle mi-malicieux mi-franc.

Eh bien qui sait, elle ne voulait peut-être plus de lui dans son lit hein. Peut-être qu'elle voulait faire ça dans son canapé même s'ils seraient plus à l'étroit quoi. Et puis, il serait un peu vexé si jamais elle l'oblige à dormir dans le salon sur le fauteuil quoi. Qui sait... il n'avait jamais eu de bras pour l'aider à s'endormir. Peut-être que cela l'aiderait, oui. S'il se réveillait en pleine nuit.. et si Marley le consolait, qui sait ... peut-être que ça lui ferait passer tous ces mauvais cauchemars. Il n'avait rien à perdre en essayant, n'est-ce pas ? « Il faudra que tu me montres tout ce que tu sais faire alors. » répondit-il sur le même ton & avec un regard similaire. Ils avaient dès le début eu cette complicité. Sans avoir besoin de mots, ils se comprenaient. En un regard, ils se parlaient. Et c'était ce qui était si magique entre eux. Il l'attira encore plus vers lui, et elle se retrouva presque à califourchon sur lui. Pour la première fois oui, ils ne devaient ça à personne d'autre. Cela faisait bizarre quand même à Swann de se dire qu'à partir d'aujourd'hui, il ne devait plus coucher avec quelqu'un d'autre. Il ne fallait surtout pas qu'il dérape. Il sentit ses lèvres s'approcher des siennes & il sourit en entendant sa proposition. « Ce que tu veux ... sauf ce genre de film ! » décréta-t-il avec un petit rire avant d'attraper son visage d'une main pour l'embrasser langoureusement, caressant sa joue avec son pouce avec une tendresse rare. Il détacha ses lèvres pour croiser son regard, et lâcha quelques éclats de rire. Allez savoir ce qui le faisait rire à ce moment-là ; certainement rien en plus.

Eh bien lui aussi ça va lui faire de ne pas devoir s'éclipser au petit matin pour éviter d'affronter ses conquêtes une fois réveillées. Même s'il a toujours rêvé d'avoir ce privilège avec Marley, il est toujours parti avant qu'elle n'ouvre les yeux. Il préfère, disons. C'était... pour ne pas s'attacher. Mais bon, voilà, rapé quoi. Lui aussi avait l'impression d'exister dans son regard. Voilà pourquoi ils n'avaient jamais eu besoin de parler. Ils existaient à travers le regard de l'autre. Pendant ces deux dernières semaines, Orphée n'avait été que le reflet de lui-même, un fantôme, un pantin. C'était avec elle qu'il pouvait vivre pleinement. Puis alors soudain, elle se mit à l'embrasser comme jamais elle ne l'avait fait. Il frémit dans chacune des parties de son corps, le prolongeant avec la même fougue. Il sentait monter l'envie en lui, mais elle rompit leur fabuleux baiser au goût nouveau, à son grand regret. « Tu vas devoir me montrer ça plus souvent alors. » Puis alors, elle parla des feux de l'amour. Ah naaaan, dîtes-moi qu'elle plaisante hein ? « Tu sais qu'y a une film de filles comme ça, qui s'appelle Marley & moi ? » demande-t-il avec un petit sourire. Ouais, il en avait entendu parler il ne sait trop où. Il la taquinait et lui caressa tendrement les cheveux ensuite, la dévorant littéralement du regard, mais ne se retenant plus de la regarder comme s'il la voyait pour la première fois.

Possible ? Tout était possible. Mais Orphée s'est toujours refusé à voir ce qu'il y avait de l'autre côté du mur, condamné à se taper la tête dedans en avançant. Il sentit un long frisson le parcourir quand elle se coucha de nouveau sur lui. Il avait l'impression que tout était nouveau, que jamais encore il ne l'avait touchée, et c'était une sensation magique. Il avait l'impression de la redécouvrir, d'apprendre à peine à la connaître, de l'approcher pour la première fois. Alors que bon, si vous avez bien suivi, vous verriez que c'est pas du tout le cas. A bout de souffle, elle détacha enfin ses lèvres des siennes après un baiser des plus ... amoureux ? Il lui sourit, et pour une fois, c'était un sourire brûlant de sincérité, un sourire sincère. Un sourire vrai, pas celui qu'il servait tout le temps à ses "amis" ou quoi. Il eut un sourire en l'entendant parler. « Roh t'es nulle de pas l'avoir. » Il bluffait, il n'avait absolument pas envie de voir ce film qui parle d'un chien. « Nan, y a aucun beau mec qui s'appelle Orphée, je sais pas pourquoi. Mais si tu veux, on peut créer notre propre film... » murmura-t-il doucement avant de lui voler un baiser, plongeant son regard dans celui, bleu & dont il ne se lasserait jamais, de Marley. Ce soir, il semblait être gentil. Attachant, attentionné, doux. Peut-être la magie du premier soir. Mais qu'en serait-il demain ? Et la semaine prochaine ? Il n'en savait rien, rien du tout. Et préférait donc ne pas y penser. Parce qu'au fond, le plus grand inconnu dans cette pièce pour notre Fowkes n'était pas Marley, mais bel & bien lui-même.