•• Quand j'ouvre les yeux, le soleil n'est pas levé depuis longtemps. Je ne suis pas un lève-tôt. Mais dès que mes yeux sont ouverts, je sais que je ne me rendormirai plus de la nuit ou de la matinée, tout dépend de l'heure qu'il est. Là, il se trouve qu'il n'est que neuf heures. Donc ça va. Mais heure d'hiver oblige, le soleil semble encore bien bas. Je déteste l'hiver. Et j'aime pas plus l'été, ok. Je me lève alors, ébouriffant mes cheveux. Je traverse rapidement l'appartement, en caleçon. Bien sûr, y a plus de café. Mon coloc' sert vraiment à rien sérieux ! Ah oui c'est vrai. Je n'ai pas de coloc'. Réprimant un petit gémissement rageux, j'enfile alors le premier T-shirt qui me passe sous la main, un jeans et hop, j'suis dehors. Ouais, il ne m'en faut pas plus pour moi. Puis ça va, j'vais pas à un bal mais prendre un café quoi. Heureusement que j'habite près d'un Starbucks. Fainéant ? Non, juste euh... consciencieux de mon temps, c'tout. Hé, le temps c'est de l'argent ok ? Je commande alors un grand café viennois et avec, part m'asseoir à une table, seul. Pauvre petit loup solitaire, ah ah. D'un regard distraite, j'observe un peu les gens qui vont et viennent dans l'établissement, avant d'attraper le journal sur une table voisine, en parcourant les titres.

•• Dans le journal, la une d'une fusillade dans une école primaire me fait frémir et pour une fois, je lis l'article en entier avec une attention bien assidue. Je ne comprendrais jamais ces salauds sérieux. Je suis tellement pris dans ma lecture que je ne remarque pas la feuille qui s'est échouée sur ma table... jusqu'à-ce qu'une voix s'élève dans mon dos. Pendant de rapides secondes, je me demande de quoi elle parle puis avise la feuille blanche tombée sur ma table. Je l'attrape alors et la retourne, mais elle est vierge des deux côtés. Soupirant alors, je me retourne vers la demoiselle, délaissant le journal et ses nouvelles scandaleuses sur le côté, pour dévisager la jolie blonde qui se trouve alors face à moi. J'accroche son regard bleu du mien qui l'est tout autant, m'accoudant au dossier de ma chaise, avec un sourire un poil charmeur. On reprend de suite les habitudes, même dès le matin. « Oh je ne vous en veux pas... Encore moins si cette feuille revient sur ma table avec votre numéro dessus. » je lance alors avec un sourire amusé, lui tendant la feuille, observant toujours avec attention les traits de son visage. Voilà que je drague une fille sans la connaître, si faut elle va... me mettre une droite magistrale.

+ J'ai beau être en train de parler, de faire genre je la drague et tout, en fait j'ai la sale impression que dès qu'elle a vu ma tête, elle a cessé de m'écouter. Quoi, j'ressemble vraiment à un ours alors ? Moi qui croyait que c'était une blague qu'on me le dise à chaque fois, en fait non. Ou en tout cas, j'lui fais vraiment peur à en voir sa tête décomposée. Bon ok, si peur qu'elle se recule d'un seul coup comme si j'allais lui bondir dessus comme un vampire assoiffé. Une table se renverse, je suis incapable de réagir, les gens autour nous regarde, se demandant ce qu'il y a – parce qu'il est clair pour tout le monde que j'y suis pour rien là, même si la « victime » a les yeux rivés sur moi comme si elle voyait un fantôme. Ou un tueur en série. Ou les deux, un tueur en série fantôme. En fait, j'crois que je lui ai vraiment fait peur, parce qu'elle s'enfuit d'un seul coup du café. Je suis toujours debout, interloqué, fixant la porte où elle a disparu. Tous les regards sont braqués sur moi mais c'est à peine si je les vois. Je me rue alors dehors à mon tour, laissant derrière-moi le serveur qui me crie un « FAUT PAYER! » indigné. Je cherche pendant deux bonnes minutes où est-ce qu'elle a pu s'enfuir et je me demande où est-ce que, MOI, en fuite, j'aurais été. Hum... pas là où y a de la foule. Même si c'est le meilleur moyen de se faire perdre de vue, on pense souvent à s'isoler plutôt -> une ruelle sombre fera l'affaire. C'est comme ça que je débarque dans la ruelle où elle se cache et dès que je la vois, je freine des quatre fers, braquant mon regard sur elle, levant les mains. « Hé, attendez, euh... ça va pas ? J'vais rien vous faire, j'sais que j'ai une gueule de carnivore ou d'ours échappé d'un parc protégé mais j'suis pas dangereux, 'fin pas avec les dames en tout cas. »

•• Je ne comprends vraiment pas ce qu'il se passe, honnêtement. Sa réaction reste super bizarre quoi, elle m'a fuit comme si j'étais un tueur en série recherché dans tous les états des états unis. Je viens donc de la retrouver dans une ruelle. Elle est prise au piège en effet car au fond, c'est un cul de sac. Moi, je parle, détendu et rieur. Sauf que je vois bien que quelque chose cloche. Elle tremble, évite mon regard et quand elle reprend la parole, c'est avec une voix faible, tremblante et apeurée. Une proie. Que lui arrive-t-il ? En connaisseur, je pense à la drogue. Entre moi qui en prends et qui suis flic de l'autre côté, je connais les symptômes. Et les tremblements, les hallucinations, ça en fait partie, non ? Je fronce les sourcils mais décide d'adopter une technique gentille. Je fais un pas, un seul. « Euh... vous devez faire erreur, je ne m'appelle pas Alan. Je m'appelle Sweeney, mais euh... n'ayez pas peur de moi, voyons. » Je tente un sourire, pour la rassurer. Je sais déjà qu'elle ne va pas me croire. Si elle hallucine, elle peut être très déterminée dans ses paroles. Et si elle ne fait pas une crise et que c'est une réaction vraie... elle ne me croira pas non plus tant elle semble persuadée que je suis ce « Alan ». « J'ai mes papiers sur moi, si vous voulez vérifier. »

•• Je la regarde. Attendri par son comportement qui semble affolé, j'ai envie de la rassurer, de la calmer, de savoir pour qui elle m'a prit, de savoir pourquoi une jeune femme si belle qu'elle a dans son regard une marque si prononcée de la peur. Je déteste voir des femmes apeurées devant un homme comme ça. Non, ma mère ne se faisait pas battre par mon père – je ne l'ai jamais connu celui-là d'ailleurs. Non, c'est juste que... j'aime pas. Et puis j'ai eu une enfance plutôt bizarre quand même, élevé parmi d'autres enfants qui comme moi, ont été habitués à l'autorité d'un seul homme, d'un seul père. Je déteste donc qu'un homme se montre violent avec une femme. Elle hoche la tête. Elle semble un peu plus calme. Je sors alors doucement mes papiers, avec des gestes détendus et lents pour ne pas qu'elle croit que je vais sortir autre chose. J'ouvre alors mon passeport et m'approche de plusieurs pas lents, laissant mon sac là où j'étais un peu avant, lui tendant simplement les papiers avec un air se voulant rassurant sur le visage. Je me passe la main sur la nuque ensuite, me redressant, posant mes yeux bleus sur elle. Elle n'a pas de traces de coups ni rien, pourtant... Est-elle traquée ?

•• Je ne sais pas quoi faire, je ne sais pas comment agir avec elle ; j'ai l'impression que son cœur va lâcher au moindre mouvement que je fais un peu brusque. Donc je me contrôle. J'ai pas l'habitude d'être si calme et lent à la détente dans mes mouvements... pourtant, j'y arrive assez bien. Je vois son regard méfiant planté dans le mien et je ne le détourne pas, tandis qu'elle jette un oeil sur mon passeport. Elle ne semble pas beaucoup rassurée et je suis un peu étonné de ce qu'elle me sort ensuite. Donc elle me prenait bien pour quelqu'un d'autre. « Ça devait être un beau gosse alors. » Ou comment détendre l'atmosphère (ou pas hein mais j'fais comme je peux) et sortir quelque chose de totalement con, by Sweeney. Je suis presque sûr qu'elle ne rira pas mais bon. De m'avoir effrayé moi ? Ben oui tiens ! « Euh, c'est plutôt vous qui avez l'air effrayée. Je peux vous aider ? Sincèrement, j'suis flic, j'peux sûrement vous aider. » Sa détresse me touche et j'ai envie de pouvoir l'aider, de comprendre quel est cet homme qu'elle fuit comme ça. Je ne fais pas un pas de plus, récupérant seulement mon passeport, toujours debout, les bras ballants. « Que diriez-vous d'un café ? » J'ai énormément de respect pour elle, et c'est pas quelque chose de courant. Je la regarde toujours, souriant un peu mais pas non plus trop pour pas passer pour un pédophile quoi. J'espère qu'elle va accepter, même si après ça, elle n'a sûrement qu'une envie : que je me barre. Mais j'la laisserais pas partir comme ça.

•• Pas besoin d'aide ? Bon, ok, tant pis, moi je propose. Elle n'est pas obligée d'accepter après. Je crains qu'elle ne décline mon offre pour un café, préférant sans doute rentrer chez elle après la frayeur qu'elle semble s'être faite mais non, elle accepte. Je suis ravi et ça se voit de suite à mon sourire. Je m'efforce de pas trop lui faire encore plus peur qu'elle n'a déjà eu. « Génial, venez. » Je fais demi-tour et récupère mon sac, avant de lui faire signe de me suivre. « J'crois qu'on va aller dans un autre, parce que... j'pense que dans celui de tout à l'heure, j'crois qu'on va nous virer. » dis-je en riant doucement. Puis alors, elle revient sur ma ressemblance avec "mon frère jumeau". Je me mets à rire, tournant mon visage vers elle en passant ma main sur ma petite barbe. « J'vous assure, j'suis fils unique et orphelin, mes parents n'ont pas pu me cacher un jumeau. » J'en rigole mais en fait, c'est tout à fait possible. Je me suis fait kidnapper dans le grand réseau de nouveaux-nés à ma naissance, donc si faut, j'ai eu un jumeau. Non impossible, quand ils ont stoppé le réseau, quand j'avais dix ans, ma mère me l'aurait dit s'il en manquait un, non ? « Mais on va l'appeler mon jumeau hum... j'ai le droit de demander qui c'est ? » Je la regarde avec presque un regard tendre. Et curieux. Il doit bien y avoir une raison à cette frayeur que j'ai vu chez elle.

•• Je vois bien que ma question la dérange, mais j'imagine le pire. J'sais pas, c'est peut-être un type qui en a après elle ou qu'en sais-je encore, moi. Après le choc qu'elle a eu, je m'attends à tout. Enfin à tout, sauf à ça. Je m'arrête net, attrapant sa main au passage pour la retenir. Je me rapproche d'elle, pris soudain d'un sentiment de protection. Je cherche son regard, et ne peut cacher ma surprise. « Quoi ? Non c'est pas vrai mais... qui est-ce ? C'est quoi son nom ? » Ce n'est même pas mon devoir de flic qui prend le dessus, c'est carrément un sentiment paternel, ou fraternel ou j'en sais rien moi ! Mais l'idée qu'un mec ait pu toucher cette beauté, et pire encore, la violer, me fout une rage immense. « Si j'le retrouve, je le tue. » J'affirme alors, très assuré de moi, comme si je la connaissais depuis toujours. Sans savoir qu'au fond, ce n'est plus la peine de vouloir l'éradiquer. Qu'elle l'a déjà fait avant moi. Et qu'elle en porte encore le fardeau. « Ne crains rien, t'es en sécurité, ok ? » Dans ma tête, elle lui a échappée il y a peu, ce qui explique sa peur, alors que ça fait des années.

•• Alan Stivson. Nom retenu et imprimé, elle peut en être certaine, dans ma tête, je cherche déjà si j'en ai entendu parler ou pas. Mais la réponse est non, jamais entendu parler. Loin ? Mais la distance ne peut pas toujours la protéger, même s'il est sur un autre continent, il peut très bien revenir la chercher. J'ai envie de la protéger, de savoir pourquoi il lui a fait ça, même si je sais que la plupart de violeurs ne veulent qu'assouvir leurs pulsions. Et puis d'un seul coup, elle me précise qu'elle est hors de danger. C'est là que je comprends. Que je comprends aussi pourquoi elle avait l'air à la fois effrayée et surprise. Surprise, étonnée, parce que.. parce qu'il ne peut pas être là. Et s'il ne le peut pas c'est qu'il est... « Il est mort, n'est-ce pas ? » Je la fixe doucement, sans aucun jugement, et m'approche d'elle, cherchant son regard. Je prends ses deux mains dans les miennes, les regardant comme si ça allait m'apporter un indice. Je relève les yeux, croisant son regard. « Viens là.. » Je la serre contre moi. Je ne la connais pas, ou plutôt à peine, je ne sais même pas son nom, mais je la comprends. Je peux deviner le poids qu'elle porte sur elle. Oui, j'ai compris que c'est elle qui l'a tué.

•• D'un côté, je suis rassuré pour elle. Si cette ordure a rendu l'âme, au moins, elle est en sécurité. Enfin plus ou moins, parce que sachant que c'est elle qui l'a tué... y a de fortes chances pour que ça fasse un remue-ménage judiciaire si ça vient à se savoir. Mais je suis presque sûr qu'elle serait jugée non coupable, pour auto-défense. Elle finit par se serrer contre moi et je l'entoure de mes bras, protecteur. Je ne veux pas qu'elle se pense seule. J'ai envie de l'aider, j'ai envie de la protéger. Et puis d'un coup, elle recule et j'ouvre mon étreinte, la dévisageant avec surprise. Je croise son regard et ne le lâche pas. Comprenant ce qu'elle croit, je secoue la tête et prends délicatement son visage d'ange entre mes mains. Sans rire, faire du mal à une fille comme ça, mais comment peut-on.. ? Je lui souris un peu, ancrant mon regard dans le sien. « Hé, hé, je ne dirais rien, je suis pas... » Je suis pas quoi ? Un bon flic ? Un traître ? Un connard ? Au fond, je suis un peu tout ça quand même. Je soupire doucement et hausse les épaules, terminant simplement : « Je te protègerai. » Pourquoi ? Comment ? Aucune idée. Mais je ne la vendrai pas, je le sais. Je caresse ses cheveux, conservant notre proximité. « Je ne sais même pas ton prénom. » je murmure doucement avec un sourire amusé.

•• Elle me demande pourquoi. Hum, question tout à fait légitime à laquelle pourtant je ne sais que répondre. « Parce que je l'ai décidé. » Je lui fais un clin d'oeil taquin. Elle me donne enfin son nom, ben oui avec toute cette action, je ne lui ai même pas demandé encore, donc il serait temps. « C'est un prénom très joli. » Je la laisse se dégager et remets mon sac sur mon épaule, étouffant un petit rire en l'entendant. « Ouais, il serait temps quand même ! Il nous aurait fait languir ce café. » D'ambiance plus détendue, je lui fais signe de venir et en quelques minutes seulement, nous rentrons dans un café. Un autre que le précédent oui, bien sûr, en plus j'suis parti sans payer alors si je retourne là-bas, flic ou pas, j'vais banquer j'crois. Je trouve alors rapidement une table à l'écart, et vais m'asseoir là-bas, l'attendant. « J'te l'offre. Pour la frayeur causée. » Je lui fais une petite grimace d'excuse, même si c'est pas volontaire si je ressemble à son violeur.

•• Je secoue la tête. Je crois, honnêtement, que je lui ai bien plus fait peur moi que l'inverse, mais bon j'peux me tromper hein. Nous nous installons alors face à face, et en attendant qu'un serveur se ramène, elle commence la discussion. Alleeeeez, bam, prends-toi ça dans la tête Huckel ! C'est une question banale. Et pourtant pour moi, c'est comme si on me demandait clairement depuis quand Aurore était.. morte. Puisque je suis resté là comme c'est ici que nous devions nous marier. Si l'on avait pas eu ce putain d'accident la veille. Je cligne des yeux, remarquant que j'ai laissé passer plusieurs secondes après sa question, je me reprends, affichant un naturel absolument faux, mais que voulez-vous, avec le temps, on devient un bon comédien. « Presque un an et demi. Et toi ? » Je n'ose pas lui poser de questions sur ce que j'ai appris tout à l'heure, même si j'en brûle. Je voudrais savoir quand ça a commencé, quand ça a prit fin, l'âge qu'elle avait, si elle le connaissait... Mais non. Je n'ose pas remuer encore ces souvenirs douloureux et quand le serveur arrive, je l'interroge du regard pour savoir ce qu'elle veut, demandant pour moi un double expresso. Ouais, là j'ai besoin de café, 'faut que je me secoue un peu.

•• Heureusement, elle ne me questionne pas sur mon hésitation. Il faut que ça cesse, que j'arrête de bloquer dès qu'on fait allusion à quelque chose qui la concerne. La concernAIT même. Il faut que j'apprenne à parler d'elle au passé. À parler d'elle tout court en fait. Je hoche la tête lentement à sa réponse. On est donc là depuis à peu près le même temps. Je me mets à rire en l'entendant. Elle est adorable. « Oh mais t'en fais pas, faut te remettre de ton choc. J'peux parler pour deux si tu veux. » Ouais enfin, c'est pas tellement mon genre d'être un grand bavard mais... mais j'sais faire une exception. Je me penche vers elle, souriant légèrement en posant mes yeux sur elle. « Bon tu sais quoi, parle-moi un peu de toi, toutes les filles, vous faîtes ça à merveilles. Alors... tu fais quoi dans la vie ? T'as quel âge ? Tu fais quoi de tes journées libres ? Et tu fais quoi ce soir ? » J'explose de rire, lui lançant un regard amusé et joueur. C'est une des rares fois où on me voit de si bonne humeur d'ailleurs, faudrait que je ressemble à un violeur plus souvent, ça me réussit on dirait.